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a été de mise à l’égard de ces volontaires, qui ont fini par être presque en dehors des règles de la vie militaire, qui, suivant une circulaire ministérielle récente, « ne vivent pas à l’ordinaire de leur corps, ou logent en ville, ou portent des tenues de fantaisie, etc. » On s’est trouvé avoir créé une combinaison dont le résultat a été de jeter dans l’armée des contingens de passage peu sérieux, tout en appauvrissant les levées annuelles d’élémens précieux, de jeunes gens dont on aurait pu faire des sous-officiers. Une institution qui dans d’autres pays a porté les meilleurs fruits a été compromise du premier coup par une application incomplète ou trop complaisante, au point que le principe même a été mis en doute et que des chefs de corps n’ont point hésité à demander la suppression du volontariat d’un an. Voilà le mal contre lequel on est obligé de réagir.

Est-ce la faute des institutions et des lois si les résultats sont souvent si incertains, si lents à obtenir ? Évidemment les institutions sont ce qu’on les fait, elles dépendent de la manière dont on les pratique. L’assemblée a beau faire des lois, il y a une chose supérieure à tout : la véritable réforme de l’armée est aujourd’hui dans les hommes, dans un certain rajeunissement de l’esprit militaire, dans la passion de s’instruire et de servir, dans l’initiative des chefs. À coup sur, il y a partout dans nos corps, à la tête de nos soldats, des hommes intelligens, instruits, dévorés du désir de bien faire, et rien ne le prouve mieux que cette laborieuse et modeste « réunion des officiers » qui s’est formée sans protection, qui continue son œuvre sans bruit, se tient au courant de ce que font les armées étrangères, et publie souvent les travaux les plus sérieux. Ce qui se manifeste de bonne volonté est immense. Il y a aussi en haut et en bas, il faut bien le dire, ceux qui se figurent qu’après les dernières épreuves infligées à notre puissance il n’y a rien de mieux à faire que de reprendre la vie d’autrefois et de revenir aux éternelles routines, aux vieilles habitudes d’indolence ou de méthodique vulgarité. C’est avec cette tradition qu’il faut rompre, et c’est à ceux qui ont un commandement, une influence, de donner l’exemple de cette intelligente activité, de ce réveil d’esprit militaire, qui seul peut aider à vaincre toutes les difficultés en donnant une vive et féconde impulsion à notre réorganisation. Si les grandes manœuvres qu’on poursuit en ce moment favorisent et encouragent ce réveil, elles sont certes tout ce qu’il y a de plus utile.

Qu’on ne s’y trompe pas : l’armée est plus que jamais l’objet des prédilections et des espérances du pays. Là-dessus, il n’y a plus d’opinions opposées, il n’y a qu’un sentiment. On ne refusera rien, on est prêt à tout donner, honneurs, distinctions, argent, moyens de discipline. Il y a surtout un point sur lequel tout le monde est d’accord, c’est que cette armée doit rester en dehors de toute politique, parce que la politique a