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que l’on y recevait embrassait presque exclusivement l’étude des langues anciennes, et préparait aux professions dites libérales. Peu de pays, malgré d’énergiques réclamations, s’étaient occupés de créer des établissemens où devaient se former des sujets spécialement préparés pour l’agriculture, le commerce ou l’industrie ; mais les besoins nouveaux introduits dans la société par l’immense développement des sciences physiques, chimiques et naturelles, ont fait sentir l’insuffisance de l’enseignement classique. Cet enseignement se donne en Italie dans deux sortes d’établissemens, les gymnases et les lycées. Les cours des gymnases embrassent cinq années, et ceux des lycées, qui en sont la suite et le complément, trois. On a reconnu partout la nécessité d’y introduire de notables modifications ; mais, comme il n’est jamais aisé de réformer des institutions que le temps a consacrées, on a pensé que le meilleur moyen de donner satisfaction aux intérêts créés par un ordre social nouveau était de fonder, à côté et en dehors des collèges et des gymnases, des écoles spéciales pour le commerce, l’industrie et les nombreuses professions auxquelles ne peut préparer l’enseignement classique. De là les écoles réelles de l’Allemagne, les écoles moyennes ou professionnelles de la France, les instituts techniques et les écoles techniques de l’Italie.

Ces différens établissemens sont nés du besoin de préparer toute une classe importante de la société à des carrières pour lesquelles l’instruction classique traditionnelle était devenue insuffisante. Les écoles nouvelles se sont remplies sans que la population des collèges, des gymnases et des lycées diminuât sensiblement. Les mathématiques, la physique, la chimie, les sciences naturelles, les langues modernes, ont remplacé dans le nouvel enseignement celui des langues anciennes, restées la partie principale et essentielle de l’enseignement classique. Or qu’est-il arrivé ? C’est que l’enseignement nouveau ne pouvait se renfermer exclusivement dans l’étude des sciences, et l’enseignement classique dans l’étude exclusive des langues et des littératures, par la raison que l’on considérerait aujourd’hui comme incomplète et insuffisante toute éducation dans laquelle ne figureraient pas ces deux élémens. Les deux ordres d’écoles se sont donc peu à peu rapprochés, et le temps n’est pas éloigné sans doute où ils finiront par se confondre. Une fausse idée les avait placés vis-à-vis l’un de l’autre dans un état d’antagonisme plein de péril. Ils devaient avoir une spécialité tellement tranchée que du choix que les parens devaient faire de l’un d’eux dépendait tout l’avenir de l’enfant, voué dès l’âge de dix ans à la carrière industrielle ou à la carrière universitaire.

Dans plusieurs pays, on a cherché à obvier à cet inconvénient en organisant l’enseignement technique sur des bases assez larges pour