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Les mémorables discussions qui ont eu lieu pendant le mois de janvier 1874 dans le parlement italien donneront une idée des questions qu’embrassait le projet de loi présenté par M. Scialoja pour une complète réorganisation de l’instruction primaire. Très énergiquement soutenue par le ministre et par le rapporteur, M. Correnti, la loi a été repoussée à une faible majorité (140 voix contre 107), par suite de l’impossibilité où s’est trouvé le gouvernement de donner une égale satisfaction aux deux fractions de la chambre, partant l’une et l’autre d’idées diamétralement opposées sur les principes mêmes de la loi. Il faut espérer que plusieurs de ses dispositions reparaîtront dans les projets de loi que les successeurs de M. Scialoja ne pourront manquer de soumettre au parlement italien. Elle introduisait dans l’organisation de l’enseignement primaire des améliorations qui avaient reçu de la chambre une approbation unanime. Un de ses bienfaits les plus notables était l’élévation des émolumens des instituteurs et des institutrices.

De toutes les questions relatives à l’organisation de l’instruction publique, il n’en est pas de plus importante et en même temps de plus délicate que celle de l’enseignement religieux dans les écoles. M. Capponi, ministre de l’instruction publique, avait en 1867, dans un rapport adressé au roi, exposé quelques-unes des difficultés que soulève la solution de ce problème. « Les principes qui président aujourd’hui à l’organisation et au développement de la société civile et à la vie politique de la nation, disait-il, font envisager cet enseignement tout autrement qu’on ne l’a fait dans les siècles passés. Il s’est opéré une grande révolution dans les rapports de l’église et de l’école. Nous croyons que la société civile doit elle-même développer ces principes et les mettre en pratique, et qu’elle est peu propre à enseigner la religion ; mais, après avoir affirmé le principe de la séparation, il reste d’un côté à rechercher les moyens d’assurer le respect de la liberté, et de l’autre à donner satisfaction aux aspirations des populations qui lui semblent opposées : le parlement seul pourra concilier tous les intérêts. »

L’article 16 de la loi Scialoja substituait dans les états une sorte d’enseignement moral et politique à celui de la religion ; il devait soulever et il a soulevé en effet de vives controverses. « Dans toutes les écoles primaires, y était-il dit, devront, conjointement avec les premières notions des plus essentielles institutions de l’état, être enseignées les maximes de justice et de morale sociale sur lesquelles celles-ci sont fondées. À cet effet sera rédigé et rendu obligatoire dans tout l’état un petit manuel approuvé par le gouvernement, ouï le conseil supérieur. » M. Bortolucci avait proposé la suppression des mots de morale sociale. « Si par morale sociale,