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royal[1]. L’animal est recouvert de plaques triangulaires au nombre de quatorze, semblables à des écussons. Le mâle, beaucoup plus petit que la femelle, n’a pas avec elle la moindre ressemblance; c’est un petit sac ovalaire de 2 millimètres de long, percé d’une ouverture à l’une de ses extrémités, tandis que l’autre est couronnée de cils. Cet être rudimentaire n’offre pas la plus légère trace des plaques qui protègent la femelle; il n’a même pas de canal intestinal. Ces petits mâles étaient logés sous le bord des écussons de la femelle. Longtemps ils ont été considérés comme des animaux parasites vivant sur ces espèces de cirrhipèdes.

Les recherches zoologiques n’absorbaient pas toute l’activité des savans du Challenger. La botanique avait sa part, représentée par M. Moseley, muni des instructions de M. Joseph Hooker. La flore des petits archipels isolés au milieu de l’Océan a toujours excité la curiosité des botanistes. On se demande depuis longtemps quelle est l’origine de la végétation qui décore ces rochers isolés battus par les flots d’une mer immense. Les plantes qui sont communes à ces îlots et aux continens les moins éloignés ont pu y être transportées par des agens naturels. Quand les distances sont considérables, de graves difficultés s’élèvent contre la supposition d’un transport par des courans marins, les vents ou les oiseaux; cependant on conçoit à la rigueur que ces causes agissant depuis des milliers de siècles aient pu apporter des graines qui ont germé sur une terre vierge et propagé l’espèce qui les a produites; mais les espèces qui sont propres à l’île et n’ont jamais été retrouvées ailleurs constituent évidemment une flore primitive et autochthone sans analogue sur le reste du globe. L’origine de la flore est encore plus difficile à expliquer quand ces îles sont volcaniques. En effet, sur les continens ou les îles formés de dépôts sédimentaires, on commence à constater que la flore actuelle n’est que la continuation d’une flore antérieure qu’on trouve à l’état fossile dans les couches géologiques, et dont une partie seulement a survécu aux derniers changemens qui se sont opérés à la surface du globe; mais comment comprendre qu’une végétation complète ait pu s’établir sur des îlots volcaniques qui ont surgi du sein des flots à l’état incandescent? La végétation qui les couvre n’a évidemment été précédée d’aucune végétation antérieure. Le petit archipel de Tristan d’Acunha est dans ce cas. Situé à égale distance des côtes orientales de l’Amérique du Sud et de la pointe méridionale de l’Afrique, il se compose de l’île principale, qui porte le nom du navigateur portugais qui l’a découverte en 1506, et de deux petits îlots. L’île principale n’a pas plus de

  1. Scalpellum regium.