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détail au traité de commerce, que les étrangers se montraient peu disposés à tolérer, et qui étaient contraires aux conventions, étaient répudiées.

Mais, par l’effet des prétentions de M. Thiers, la question financière avait dégénéré en un débat pour ou contre l’impôt des matières premières. Dans le dédale où l’on avait été entraîné par le chef de l’état, on avait perdu de vue les règles fondamentales relatives aux impôts; de plus en plus on avait incliné vers les expédiens. Toute pensée générale avait disparu; une foule de membres de l’assemblée, ayant chacun son spécifique financier, se flattaient de l’espérance de le faire triompher. A l’instar de M. Thiers, qui se refusait à toute transaction et maintenait imperturbablement son idée favorite, chacun s’érigeait en intransigeant pour faire prévaloir sa propre conception. Le morcellement croissant des partis dans l’assemblée favorisait ces tendances particularistes. Des propositions conformes aux principes et aux précédons, qui eussent réuni une grande majorité si elles avaient été présentées avec résolution par le gouvernement de M. Thiers du temps de sa lune de miel avec l’assemblée, avaient perdu leurs chances. Enfin la crainte des électeurs s’en était mêlée, et, à mesure qu’on s’approchait du renouvellement de l’assemblée, elle dévoyait davantage les esprits, et achevait de les détourner des impôts qui méritaient la préférence pour les rendre favorables à d’autres qu’il aurait convenu d’écarter : on en verra bientôt quelques exemples. Ces diverses raisons expliquent pourquoi l’édifice financier qui a été érigé depuis 1871 offre de nombreuses imperfections et de nombreux inconvéniens.


III. — EXAMEN SOMMAIRE DES IMPÔTS NOUVEAUX.

Si l’on examine le tableau des impôts votés depuis la réunion de l’assemblée nationale en 1871, on reconnaît qu’ils peuvent se répartir sous diverses têtes de chapitre que nous allons spécifier successivement. Quelques-uns s’attaquent directement au luxe et au plaisir; ainsi les chevaux et voitures procurèrent d’abord 6 millions 1/2 et donnent aujourd’hui 9 millions; les cercles et les billards dépassent 2 millions; les cartes avec les licences, qui ne sont guère du luxe, 6,300,000 francs. L’usage du tabac est un luxe à l’usage de toutes les classes sans exception, et le trésor en retire 40 millions de plus qu’auparavant. Il convient d’y joindre le droit de garantie sur les articles d’or et d’argent, auquel on a demandé une modique somme en sus. On a ainsi pour le contingent du luxe proprement dit une soixantaine de millions.

L’impôt du revenu, analogue à l’income-tax des Anglais, a été proposé avec une ferme conviction par divers députés et par des