des bas de soie. » C’est de cette rencontre que naquit Volga : les bylines lui attribuent l’origine dont se flattait Alexandre le Grand. Fils du serpent, il connaît toutes les ruses et tous les artifices de la magie divine. Comme le Protée, comme le Jupiter amoureux des traditions grecques, nous le voyons se métamorphoser en hermine, en poisson, en faucon lumineux, en loup au pelage gris (par là il rappelle ces Scythes loups-garous dont parle Hérodote), en aurochs au poil brun. Quant à Sviatogor et à Samsce, chez lequel on retrouve le trait biblique des cheveux miraculeux, ce sont des géans enivrés de leur force démesurée. « S’il y avait un anneau au ciel et un anneau à la terre, s’écrie un jour Sviatogor, je prendrais celui-ci de la main droite, celui-là de la main gauche, et je rapprocherais pour les confondre le ciel et la terre. » Dieu voulut punir cette parole d’orgueil. Sviatogor, passant un jour à cheval dans la steppe, vit un vieux homme qui le pria de l’aider à charger son sac. Le héros veut enlever le sac du bout de son fouet, il ne peut, — du bout de son doigt, il échoue encore, — de sa forte main, il ne réussit pas mieux. « Jamais, depuis tant d’années que je cours le monde, je n’ai vu semblable merveille ! » Il saute à bas de son cheval, et des deux mains, avec un effort immense, essaie de soulever ce maudit sac. Une sueur de sang ruisselle de son front. Il croit enfin avoir enlevé le sac jusqu’à la hauteur de ses genoux; mais c’est lui-même qui s’est enfoncé dans le sol jusqu’aux genoux. Il redouble d’énergie et croit l’avoir enlevé jusqu’à sa ceinture; mais c’est lui-même qui s’est enfoncé dans le sol jusqu’à la ceinture. Quelques chansons disent que Dieu se contenta de lui avoir infligé cette leçon de modestie. D’autres veulent que Sviatogor (la Montagne-Sainte) soit resté depuis ce temps enraciné dans le sol comme un roc sourcilleux. Ce n’est pas à cette génération de géans qu’appartient Ilia. Dans certaines variantes de ces bylines, après avoir vidé la coupe miraculeuse, il dit aux étrangers divins : « Je me sens une telle force que la terre peut à peine me porter. » Ce n’est pas ce que veulent ses bienfaiteurs : Ilia doit être un héros qui ne soit pas à charge à la mère humide ; ils lui font boire un autre breuvage qui réduit cette vigueur excessive à de plus raisonnables proportions.
Quel est le premier usage que fait Ilia de la force qui est en lui? Pendant que ses parens sont endormis, il va faire leur besogne rustique. Les deux vieillards s’épuisaient à défricher une forêt : Ilia en un tour de main en arrache tous les chênes et les lance au loin dans la rivière. Il jouit de l’étonnement des deux campagnards à leur réveil; il leur raconte sa guérison et leur annonce qu’il va partir. Pour se procurer un coursier, il suit à la lettre les instructions qu’il a reçues de ses bienfaiteurs divins. Il s’en va sur la grande route, et dès qu’il rencontre un mougik conduisant par la bride un cheval