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Quelques mois plus tard, plusieurs membres de la famille royale et la plupart des habitans du château de Claremont furent atteints d’une sorte de maladie de langueur accompagnée d’assez douloureuses souffrances. L’habile médecin qui fut appelé alors et qui depuis a partagé leur exil, le docteur Henri Gueneau de Mussy, constata enfin que l’eau potable s’était viciée dans les tuyaux de plomb qui l’apportaient et la distribuaient dans le château. La cause du mal ainsi reconnue, un changement de résidence était naturellement indiqué. Informé de ces circonstances, sir Robert Peel m’adressa sur-le-champ la lettre suivante :


« (Traduction.) — Drayton Manor, Fazeley, le 29 octobre 1848.

« Mon cher comte de Jarnac, quand lady Peel et moi nous étions au château de Windsor, nous avons appris, avec beaucoup de regret, que le roi et la reine des Français et quelques membres de leur famille ont été sérieusement indisposés.

« Il est possible qu’un changement d’air et de lieu puisse contribuer à leur prompt rétablissement, et nous serions particulièrement flattés si leurs majestés condescendaient à faire l’essai de ce remède à Drayton Manor, Ici, l’isolement est absolu. La distance de Londres est parcourue en quatre heures. Nous aurions des logemens pleinement suffisans à offrir aux princes, aux princesses, à tous ceux enfin qui résident à Claremont, et nous serions ravis outre mesure de l’honneur de les recevoir.

« Un seul wagon (celui dont notre reine se sert quelquefois) conduirait le cortège royal tout entier de la station de Euston-Square à Tamworth, qui est à deux milles seulement du château. J’arrangerai tous les détails du voyage avec la plus grande facilité.

« Tout se passerait absolument comme à Claremont, sauf la seule différence à laquelle j’ai fait allusion plus haut, le changement d’air et de résidence. Nous sommes récemment revenus ici, et toute époque qui serait indiquée pour la visite nous conviendrait absolument.

« Je place, mon cher comte de Jarnac, l’affaire entre vos mains.

« S’il y avait de ma part de la présomption à soumettre une requête pareille à leurs majestés, si elle entraînait une déviation quelconque aux usages qui auraient été observés dans des circonstances plus prospères, vous demeurez pleinement libre de ne faire à leurs majestés aucune mention de cette lettre. S’il en est autrement, je me flatte que vous consacrerez votre influence à nous procurer l’honneur et la véritable joie de recevoir dans notre demeure leurs majestés et toute leur famille réunie à Claremont.

« Croyez-moi, mon cher comte de Jarnac, toujours très fidèlement à vous,

«ROBERT PEEL. »