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n’avancerai donc pas que Mme Szarvady n’eut jamais de rivale à ce jeu ; mais ce qui me semble être la vérité, c’est que depuis la retraite de Clara Schumann, le musicien de Dusseldorf n’a point rencontré de plus sérieuse interprète, et ce que je dis pour les œuvres de piano de Schumann s’applique également aux dernières sonates de Beethoven.

Tous les ans, le monde des concerts agrandit son royaume, il a pour capitale le Conservatoire, et pour provinces trente sociétés, toutes florissantes, sans compter les salons où se produisent maintenant des virtuoses inédits. Qui connaissait naguère M. Diaz de Soria ? Fraîchement débarqué, il voit le monde, chante ici et là de jolis petits riens avec un certain agrément, et presque aussitôt la mode fait de lui son Brummel, et les salons se le disputent. Voix charmante, d’un timbre pur, sinon très solide, un baryton qui ténorise, mais de science, point ; si vous voulez un musicien, un chanteur, un artiste, il faut vous adresser à M. Pagans. De ce que M. Pagans dit à ravir le répertoire espagnol, nombre de gens seraient tentés de le prendre pour un simple débitant de boleros et de seguidilles ; qu’ils attendent que ce maître espagnol leur chante un air de Mozart ou de Cimarosa, Il mio tesoro ou Pria che spunti, rien que cela, et tout de suite ils seront détrompés. La nature se charge de timbrer la voix, elle ne se charge pas de la poser. N’oublions point que l’école espagnole, qui tient une si large place dans la peinture, compte aussi quelque peu dans l’art vocal ; l’enseignement des Porpora et des grandes maîtrises italiennes a poussé tra las montes d’illustres branches qui se sont perpétuées jusqu’à nos jours. Tandis que l’école-mère a cessé de fonctionner en Italie, la transmission n’a pas cessé de s’opérer de ce côté : Garcia et sa race nous viennent de là ; de lâ aussi la pureté, la simplicité de style de M. Pagans ; l’art qu’il pratique et qu’il professe n’est point chose de son invention, il le tient des principes qu’il a reçus, car il en est de l’art du chant comme de la statuaire, et dès qu’on parle de remonter à la vraie source, les sculpteurs invoquent Phidias, comme les vocalistes disent : Porpora.


F. DE LAGENEVAIS



Rapports sur les opérations de la Société de protection des Alsaciens-Lorrains.


L’œuvre si méritoire de la Société de protection des Alsaciens-Lorrains que préside M. le comte d’Haussonville se poursuit avec une incessante et généreuse activité. Le compte-rendu de l’assemblée générale du 15 mai dernier constate que les dépenses, qui au 30 avril 1873 s’élevaient à 949,000 francs, se sont accrues pendant le dernier exercice de 657,000 francs, laissant à la date du 30 avril 1874 un solde disponible d’environ 960,000 francs, où les souscriptions n’entrent cette fois que pour une somme de 44,000 francs, et l’exposition de peinture ouverte au