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populations malaises avaient été menées à bonne fin par des forces plutôt inférieures. On partait plein de confiance, et le brave général Kœhler se flattait d’abattre promptement l’arrogance d’Atchin avec les troupes placées sous son commandement.

Le négociateur qui devait demander des explications au sultan d’Atchin, et, en cas de refus, lui présenter l’ultimatum hollandais, fut M. F. N. Nieuwenhuizen, vice-président du conseil des Indes. Il s’embarqua sur la Citadelle d’Anvers, suivi de près par les autres navires de l’escadre, et le 22 mars 1873 il jetait l’ancre en rade d’Atchin. Il fut bientôt clair que le recours à la force serait inévitable. Les dispositions de la population étaient fort mauvaises; une foule de gens armés allaient et venaient sur le rivage, d’autres élevaient des retranchemens sur plusieurs points. Le sultan, pour toute satisfaction aux demandes catégoriques de M. Nieuwenhuizen, déclara qu’il attendait toujours la réponse à la lettre qu’il avait adressée au souverain de la Turquie, qu’il pourrait bien l’attendre encore six mois. En un mot, le sultan refusait toute explication.

La guerre fut donc déclarée le 26 mars, et le 5 avril les troupes expéditionnaires rejoignirent l’escadre. Après une reconnaissance exécutée non sans péril, le débarquement s’opéra le 8 et le 9 sous la protection des canons de la marine, à quelques lieues à l’ouest du Kraton. Déjà l’on ne pouvait plus se faire illusion sur l’énergie de la résistance qu’on aurait à vaincre. Les ennemis fourmillaient dans les bois épais, le long des fossés, derrière des redoutes élevées et défendues avec un art qui faisait soupçonner la présence d’aventuriers européens. Le sol très marécageux, entrecoupé de cours d’eau, malsain et opposant de grandes difficultés au transport de l’artillerie, compliquait beaucoup la marche en avant. Cependant le corps expéditionnaire maintint vigoureusement sa supériorité tant qu’il fut sur le rivage et que le feu des vapeurs l’aida à détruire les fortifications ennemies qui inquiétaient son campement. Ce fut bien autre chose quand il fallut s’avancer dans l’intérieur et dans la direction du Kraton, centre des positions atchinoises et la plus forte de ces positions. L’armée hollandaise vint se heurter contre le Missigit (mosquée) fortifié, qui servait au Kraton d’ouvrage avancé. Les grenades hollandaises mirent le feu au Missigit, que les Atchinois durent évacuer, mais ils continuèrent de tirer sur la position abandonnée soit des bois environnans, soit du Kraton lui-même. Leur feu fut si violent que le général hollandais crut imprudent de rester dans le Missigit et fit retirer ses troupes. C’est seulement le 14, les pluies ayant retardé une nouvelle attaque, qu’après un engagement très vif le Missigit fut repris par les Hollandais sur l’ennemi, qui y était rentré. Ce succès devait être le dernier de la première expédition. Le général Kœhler, voulant mettre ses soldats à l’abri,