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gouvernement néerlandais ne s’attendait pour le moment qu’à l’envoi d’une force maritime respectable qui appuierait les réclamations. A Batavia, le gouverneur et le conseil des Indes furent d’avis que la simple apparition d’une escadre serait inefficace. Des bruits fâcheux circulaient sur l’ingérence possible de marines étrangères; on parlait, entre autres, de l’intention du commandant de l’escadre américaine en croisière dans les mers de Chine de venir montrer son pavillon sur les côtes de Sumatra. On ne pouvait savoir au juste jusqu’à quel point les intrigues atchinoises à Singapour pouvaient compliquer une situation déjà tendue. Bientôt la mousson du sud allait souffler et rendre très difficile l’abord des côtes. Enfin l’on était certain de rencontrer les plus mauvaises dispositions à la cour d’Atchin.

Toutes ces raisons déterminèrent le gouverneur-général et le conseil des Indes à frapper tout de suite un grand coup. Il fut décidé qu’une petite armée suivrait de près la flottille qui devait servir d’escorte et d’argument au négociateur hollandais. On était assez mal renseigné, il est vrai, sur les forces réelles dont le sultan pouvait disposer. Les rapports de quelques voyageurs compétens, néerlandais et anglais, qui avaient pu visiter Atchin s’accordaient à représenter ces forces comme peu redoutables. Les fortifications du Kraton étaient, disaient-ils, à peu près tombées en ruines, la population divisée, l’anarchie très grande. Ces appréciations étaient erronées ou du moins incomplètes, et les Hollandais ne devaient pas tarder à l’apprendre à leurs dépens; mais on les tint pour suffisamment établies, et un corps expéditionnaire d’environ 4,000 hommes, sans compter un millier de ces coulies qui, dans les pays tropicaux, doivent toujours accompagner les armées, fut mis sous les ordres du général-major Kœhler. L’infanterie, forte de 2,800 hommes, comprenait l,934 soldats indigènes. Elle comptait de plus un bataillon de 450 soldats de marine, jouissant en Hollande comme chez nous d’une excellente réputation militaire. La cavalerie se bornait à un demi-escadron, le génie à une forte compagnie de 120 soldats, et l’artillerie était représentée par une batterie de montagne de quatre obusiers de 12, quatre canons rayés de 8 et deux mortiers de 12. Si aux 4,000 hommes, chiffre extrême des troupes destinées à agir sur terre, nous joignons un millier de marins composant les équipages du Djambi, de la Citadelle d’Anvers, du Marnix, du Coehorn, vapeurs à hélice, du Sourabaya et du Sumatra, vapeurs à roues, et de quelques autres navires de moindre importance, nous évaluerons à environ 5,000 hommes le total des forces déployées contre Atchin lors de cette première expédition. En fait, les expéditions dirigées antérieurement par les Néerlandais contre d’autres