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suivant cette étendue, la taxe afférente à la classe à laquelle elle devra dorénavant appartenir ; mais, messieurs, l’honorable M. Raudot est parti d’un point qui n’est pas conforme à la réalité des faits. Il a supposé que toutes les parcelles incultes qui ont été mises en culture l’ont été dans toute leur étendue ; or cela n’est pas. Une parcelle, un bois par exemple qui a 5, 10 hectares, aura été défriché dans l’étendue d’un hectare. Un terrain inculte, qui avait 4 ou 6 hectares d’étendue, aura été défriché et mis en culture pour une moitié, un tiers, un quart de son étendue ; eh bien ! je vous le demande, comment le saurez-vous ? Comment pourrez-vous déterminer, sur une parcelle dont l’étendue sera portée en bloc sur la matrice cadastrale, la partie restée en friche et la partie mise en culture ? Comment pourrez-vous fixer l’étendue de la partie qui aura été défrichée, si vous ne la mesurez pas ? Par conséquent on aura beau faire, on aura beau dire, on aura beau désirer que cela ne soit point, l’opération d’arpentage devient absolument inévitable. » Il ne faut pas espérer améliorer l’instrument que nous possédons, le rajeunir en quelque sorte ; les essais de révision que l’on tenterait aujourd’hui seraient certainement aussi infructueux qu’ils l’ont été jadis ; les paroles du premier consul sont toujours vraies, les demi-mesures en pareille matière font perdre du temps et de l’argent.


III

Si l’on ne peut toucher à l’édifice sans le reprendre par la base, le restaurer sans le reconstruire à neuf, serait-il possible du moins d’en utiliser l’architecture ? S’il faut recommencer le cadastre, pourrait-on le refaire utilement sans modifier profondément les anciennes méthodes ? A cet égard, le doute n’est pas possible : en appliquant les anciens procédés, on referait à grands frais une seconde opération tout aussi défectueuse que la première. Bien des intérêts sont en jeu dans la question, aussi elle ne laisse pas que d’être fort compliquée ; essayons d’en préciser les données.

Justement attaqué comme instrument de répartition par les partisans d’une péréquation de l’impôt foncier, le cadastre n’est pas moins vivement critiqué au nom d’intérêts très différens. Circonstance digne de remarque, les hommes qui désirent le plus ardemment peut-être une refonte cadastrale sont pour la plupart opposés à tout remaniement de l’impôt foncier ; adeptes fidèles du principe de la fixité, ils ne veulent voir dans le cadastre qu’un titre de propriété. Ils y cherchent des garanties puissantes pour la terre, des facilités nouvelles pour les transactions dont elle est l’objet, enfin une base solide pour le crédit agricole. A cet égard, les représentans les plus autorisés de l’agriculture sont unanimes dans leurs