délices des femmes, il n’est pas étonnant qu’on ait craint que tout cela ne montât au bonnet de Madame Adélaïde[1]. »
Ne dirait-on pas que Figaro en sait long sur le chapitre de la princesse ? Il ne pouvait paraître, il est vrai, en savoir moins que le public, lequel jasait beaucoup sur le compte des princesses, d’Adélaïde surtout. Les propos défavorables à Mesdames avaient fait le tour de l’Europe. Étonnée de les voir persister à Vienne, Marie-Thérèse en écrivit un jour au comte, de Mercy pour savoir le vrai. Le comte ne cacha pas à sa souveraine qu’une tendresse plus que fraternelle aurait existé, disait-on, entre le feu dauphin et Adélaïde, et qu’ensuite cette princesse aurait eu du goût pour l’évêque de Senlis, premier aumônier de Louis XV. Madame Victoire passait pour avoir eu un enfant de son père[2]. D’autre part, dans une publication étrange, ne visant évidemment qu’au scandale, qui parut en 1790, à l’imprimerie royale, sous le titre de Livre rouge, ou liste des pensions secrètes sur le trésor public, avec les noms et qualités des pensionnaires, l’état de leurs services, des observations sur les motifs qui leur ont mérité leur traitement, Beaumarchais est noté comme ayant reçu 60,000 livres « en considération de la discrétion sur les couches de Madame Adélaïde. » La discrétion de Figaro ! Quel gouvernement assez abandonné des hommes et des dieux a jamais pu s’y fier ? Déshonoré, flétri par les tribunaux, réduit au rôle d’agent de police secrète, Beaumarchais n’avait jamais été moins capable de supprimer un pamphlet : il était infiniment plus capable de l’écrire. Il n’en imposa qu’à Paris. A Vienne, on ne daigna même pas sourire de ses tours pendables. Il ne paraît pas, à dire le vrai, que Beaumarchais en ait su plus qu’on en sait aujourd’hui sur Adélaïde, si bien qu’en bonne critique il faut encore s’en tenir, après un siècle, aux paroles du comte de Mercy-Argenteau : « parmi une nation aussi légère, il ne m’a pas manqué de moyens d’approfondir de pareils faits, et je puis dire que mes recherches ne m’ont pas procuré d’indices qui donnassent la moindre lueur de probabilité à ces affreux propos. »
On doit pourtant prendre garde, en pareille matière, de trop affirmer. C’est bien assez de croire pour soi : il serait téméraire de prétendre amener les autres à notre sentiment. On lit dans les Souvenirs de la marquise de Caylus que M. de Lussay, un peu trop entêté. de son opinion sur la vertu de Mme de Maintenon, s’attira cette repartie de madame sa femme : « comment faites-vous, monsieur, pour être si sûr de ces choses-là ? » N’oublions pas qu’un assez