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n’eussent été transportés par ces eaux en même temps que d’autres à l’état rudimentaire ou en voie de formation, et que ces derniers, après le cataclysme, se trouvant dans le milieu favorable à leur développement, n’eussent achevé de se cristalliser. Cela expliquerait assez les anomalies que présente la coexistence en un même endroit de pierres dont les unes paraissent n’avoir jamais subi aucun effort, tandis que les autres sont dans des conditions diamétralement opposées. Si cette théorie, que je hasarde sous toutes réserves, était sanctionnée par l’autorité d’un savant spécialiste après mûr examen des lieux, on serait fondé à croire qu’en recherchant les traces du torrent original et en le remontant suivant les indications des localités, on pourrait arriver au point initial d’où sont partis ces diamans et les surprendre pour ainsi dire en voie de formation. On se procurerait ainsi, outre l’éclaircissement d’une très intéressante question scientifique, une nouvelle source de richesses incalculables. Un fait qui viendrait dans une certaine mesure confirmer cette idée, c’est qu’aux mines de rivières, situées dans la direction du goulot et d’où viennent tous les orages et les grandes pluies, presque tous les diamans sont entiers, — ce qui semblerait indiquer que c’est à partir de ce point ou un peu plus haut seulement qu’ont commencé les débordemens qui ont charrié les diamans et les ont brisés.

Si les observations qui précèdent ont été faites avec assez d’exactitude pour établir qu’une partie au moins des pierres ont pris naissance à l’endroit même qu’elles occupent dans le bassin du New-Rush, il demeurera acquis que la cristallisation du diamant n’exige ni température très élevée, ni pression extraordinaire, ces conditions n’ayant pu être remplies à la surface du sol, à 1,800 mètres d’élévation et au milieu de calcaires non calcinés.

Il n’est pas inutile d’ajouter qu’en dehors des bassins diamantifères il y a encore des gisemens de minéraux ayant l’apparence de l’anthracite ou du bog-head, et parmi lesquels se rencontre du fer sulfuré.

Quel sera maintenant l’avenir réservé aux champs diamantifères du Cap ? Tous les placers mis en exploitation jusqu’ici, étant de peu de surface, ont été bien vite épuisés ; seuls Du Toit’ s Pan et le New-Rush continuent à maintenir leur production en dépit des quantités considérables de pierres précieuses qui en sont extraites, et il serait téméraire d’assigner un terme à cette fécondité. Du reste la région comprise entre le Vaal et l’Orange est si vaste qu’il se passera encore bien des années probablement avant qu’elle ait été sondée dans toutes ses parties ; le champ reste donc ouvert aux suppositions.


DESDEMAINES-HUGON.