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dignes d’être mentionnées. La première, c’est que la qualité la plus précieuse, en raison de la pureté de son eau, de forme octaèdre régulière à arêtes vives, est sujette à se briser au contact de l’air. C’est ordinairement dans le cours de la première semaine après la découverte que la pierre se gerce et se casse ; cependant il est à ma connaissance que des pierres qui avaient résisté trois mois et plus ont fini par obéir à cette loi assez commune. Ces diamans ont les faces excessivement unies, ce qui s’oppose peut-être à la libre circulation du calorique, et empêche les couches internes de se mettre en équilibre avec l’air ambiant, et de pouvoir se dilater ou se contracter en même temps que les couches externes, d’où cette tendance à éclater. Il n’y a que les diamans de cette catégorie qui soient sujets à ces accidens : je n’ai vu qu’une seule exception dans un diamant octaèdre de 16 carats qui n’avait qu’une gerçure intérieure lorsque je l’ai trouvé, et qui le lendemain avait craqué dans tous les sens, malgré la précaution que j’avais prise de l’isoler par une enveloppe de suif. Il n’y a pas d’exemple d’un diamant jaune ayant jamais craqué. Il n’est jamais arrivé qu’aucun de ces diamans, une fois taillé, se soit gercé ou brisé aux changemens de température. Or, pendant l’opération de la taille, le diamant est fortement échauffé par la pression exercée contre la roue du lapidaire tournant avec une vitesse de 1,200 tours à la minute ; n’est-il pas permis d’en conclure que, si après ce travail la pierre a perdu la propriété de se séparer en morceaux, c’est que la chaleur développée a permis aux molécules de se grouper d’une manière normale ? On pourrait aussi inférer de là que ces diamans ont dû être formés dans un milieu d’une température élevée et qu’ils ont éprouvé un refroidissement subit, une sorte de trempe. En effet, on peut fort bien supposer, en considérant la mauvaise conductibilité du cristal pour la chaleur, qu’une couche très mince à la surface se trouve, pour une cause quelconque, assez trempée pour être dans un état de dilatation très différent de celui des couches intérieures, ce qui fait qu’un changement de température en produit la rupture et détermine une fissure qui se propage dans la masse, comme cela a lieu pour les larmes bataviques. Une autre circonstance rend plus frappante encore l’analogie d’arrangement moléculaire qui existe avec le verre trempé. Les substances non cristallisées régulièrement ou appartenant au système cubique sont douées de réfraction simple, — le verre et le diamant sont dans ce cas ; mais, lorsque le verre a été trempé, il acquiert la propriété de polariser la lumière, de même que certains diamans, ce qu’on regarde dans ces deux cas comme l’effet d’un groupement forcé de molécules dû à l’action de la trempe. Il serait intéressant de savoir si les diamans qui par exception polarisent la lumière sont précisément ceux qui sont sujets à se briser.