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que soit le degré de froid de la nuit, le thermomètre ne reste pas, pendant le jour, au-dessous de 6 degrés centigrades. Il se produit donc tous les jours une variation de 15 à 20 degrés dans la température pendant les premières heures de la matinée en hiver, et une variation plus forte pendant les dernières heures de la nuit en été. Ces changemens s’expliquent par l’élévation extrême du terrain d’une part, et sa nature sablonneuse de l’autre ; le rayonnement est encore augmenté dans une proportion notable par les immenses amas de sables et de coraux accumulés autour des habitations à la suite des travaux ; , et au milieu desquels chaque tente se trouve placée comme dans un foyer ardent.

Pendant tout l’été, et surtout pendant les mois de fortes chaleurs (décembre à mars inclusivement), le pays est visité par des pluies torrentielles qui font songer à cette expression de cataracte usitée dans les Écritures. En quelques minutes, les plaines se transforment en lacs ; les plus petites sinuosités de terrain se changent en ruisseaux dangereux à traverser ; les endroits encaissés deviennent les lits de véritables torrens qui déracinent les arbres sur leur passage, vont grossir les fleuves, et en peu de temps les faire monter de plusieurs mètres. Ces pluies, qui d’ordinaire viennent de Klip-Drift (mines de rivières), s’annoncent par un nuage que l’on voit poindre à l’horizon, et qui est précédé de quelques rafales ; au bout d’une demi-heure environ, le ciel entier est pris, les éclairs partent de tous les côtés à la fois, laissant à peine aux yeux le temps de se remettre ; le tonnerre gronde et tombe avec des vibrations et des éclats dont on ne peut se faire une idée sans les avoir entendus ; le feu semble couler avec l’eau, ce qui fait dire aux mineurs que le tonnerre tombe « comme la pluie. » Le 6 octobre 1872, quoique la saison des orages ne fût pas encore commencée, il y eut cinq hommes frappés de la foudre dans le bassin du New-Rush seulement. Après ces cataclysmes, le ciel se dégage en peu de temps et redevient serein ; tout se calme et rentre dans l’ordre accoutumé. Il arrive souvent que l’horizon entier est couvert et que le voyageur étonné voit briller les astres au-dessus de sa tête, alors que la ceinture de nuages noirs qui encadre cet horizon lui présente le spectacle grandiose de plusieurs orages éclatant simultanément sur divers points et se répondant avec une intensité toujours croissante. Ces convulsions de la nature frappent de terreur et d’admiration ceux qui ont la chance d’y assister, car dans cette seule région de l’Afrique probablement l’observateur peut voir une série de phénomènes électriques assez difficiles à rencontrer réunis ailleurs : ainsi il n’est pas rare d’y voir des étincelles remontantes, espèce de chocs en retour, allant de la terre aux nuages avec un petit mouvement en zigzag peu accentué, et pendant les forts orages les objets sont tellement -