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nouveaux appareils, toujours fort coûteux. Quand ces éboulemens ont lieu de jour, ceux qui sentent la terre trembler sous leurs pieds ou qui voient la première fissure se produire donnent aussitôt l’alarme, et chacun au-dessous s’empresse de fuir pour échapper aux malheurs affreux qui en résulteraient ; mais il s’en produit quand même, car l’imprudence est excessive et l’habitude du danger fait qu’on le craint moins : aussi dans ces cas y a-t-il souvent des personnes gravement blessées ou enterrées vives sous des masses tellement énormes de matériaux que l’ardeur qu’on met à leur porter secours n’est pas toujours couronnée de succès. Ce n’est pas le seul danger qui menace le mineur à ciel ouvert, car il arrive presque tous les jours que des charrettes, en se croisant sur les rues, sont forcées de passer trop près du bord, qui s’écroule sous le poids de la charge, et charrettes, bœufs et chevaux sont précipités au fond du claim, où ils arrivent broyés. Toutefois, par un hasard extraordinaire où l’on pourrait bien voir la protection divine, il n’est jamais arrivé, à ma connaissance du moins, qu’un mineur ait été sérieusement blessé par la chute de ces corps ; s’il en était autrement, les esprits seraient trop frappés pour continuer un travail qui met incessamment la vie en danger, et personne ne consentirait à chercher une fortune problématique dont on n’aurait guère la chance de jouir.

Lorsque l’écroulement des voies de communication a rendu impossible l’exploitation des claims du centre, on établit sur le pourtour supérieur du bassin des pieux solidement fichés en terre et assujettis les uns aux autres, que l’on fait communiquer chacun avec un claim au moyen d’un câble en fil de fer galvanisé, sur lequel court une poulie armée à sa partie inférieure d’un crochet pour suspendre les seaux de terre, et que deux hommes font monter au moyen d’une corde qui s’enroule sur un tambour mû par une manivelle. Les travailleurs du fond remplissent les seaux, et la terre, une fois rendue en haut, est empilée pour être enlevée plus tard, ou versée dans des caissons d’où on la fait couler dans les charrettes qui viennent la recevoir. La vitesse avec laquelle montent les seaux ainsi tirés est telle que le balancement produit les fait souvent décrocher pour le plus grand malheur de ceux qui se trouvent au-dessous, et il est vraiment surprenant que malgré ces chutes journalières il n’y ait jamais eu à enregistrer aucun accident mortel. Quand un Cafre reçoit un seau ou une pierre sur la tête ou même sur toute autre partie moins délicate, il commence à tout hasard par tomber en syncope et par faire le mort ; on lui jette de l’eau à pleins vases, on y joint d’ordinaire quelques coups de pied dans les côtes, et le remède est souverain pour le remettre sur ses jambes, car cette race est dure au mal au-delà de tout ce qui peut s’imaginer, et supporte avec impunité des coups dont aucun autre homme ne