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L'IDEE MODERNE
DU DROIT

LE DROIT, LA FORCE ET LE GENIE.
D'APRES LES ECOLES ALLEMANDES CONTEMPORAINES

I. Hegel, Grundlinien der Philosophie des Rechts, 1821. Philosophie de l’esprit, trad. par M. A. Véra, 1867. — II. Strauss, Mélanges philosophiques et religieux, trad. par M. Ritter, 1873. — III. A. Véra, Strauss, l’ancienne et la nouvelle loi, 1873. — IV. Schopenhauer, Parerga und Paralipomena, 2e édit., 1862. — V. Th. Ribot, Philosophie de Schopenhauer, 1874. — VI. De Hartmaon, Philosophie des Unbewussten, 5e édit., 1873. — VII. Kirchmann, Die Grundbegriffe des Rechts und der Moral, 1869. — VIII. Bluntschli, Geschichte des Staats-rechts, 1873.

Chacun des trois grands peuples modernes, Allemagne, Angleterre et France, se flatte de représenter mieux que les autres par son esprit national l’esprit de l’humanité même. On avait concédé au génie français depuis le XVIIIe siècle l’honneur d’être le moins exclusivement national et le plus vraiment humain : le XVIIIe siècle s’intitulait lui-même le siècle « de la raison et des lumières, » le siècle de la liberté, le siècle de l’humanité. Aujourd’hui la prétention de l’Allemagne va plus loin : à entendre ses philosophes et ses politiques, elle ne représenterait rien moins que « l’esprit universel, l’idée absolue, » qui est aussi la puissance absolue. C’est ce que Fichte soutenait déjà avec un enthousiasme d’ailleurs si noble, — le lendemain même de nos victoires d’autrefois qui devaient amener nos défaites d’aujourd’hui, — dans ces mâles Discours à la nation allemande prononcés souvent au bruit du tambour français ; c’est ce que répétèrent plus tard Schelling, Hegel et toute son école ; c’est ce que redisent maintenant avec une confiance