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de sorte que les légitimistes, par leur précipitation, par la singularité de leurs interprétations audacieuses et subtiles, n’arrivent qu’à rendre plus prochaines, plus nécessaires et plus inévitables à tous les points de vue ces solutions constitutionnelles qu’ils n’étaient peut-être pas les premiers intéressés à provoquer. Les chevau-légers ont sûrement bien employé leurs vacances.

Et maintenant est-ce que tout cela ne met pas sur la voie des combinaisons possibles dans un temps donné, des conditions dans lesquelles peut s’accomplir sérieusement cette organisation constitutionnelle qui apparaît comme le programme de la session prochaine ? Chose à remarquer, le gouvernement de M. le maréchal de Mac-Mahon a cela de curieux qu’il n’est contesté dans son principe ou affaibli que par quelques-uns de ceux qui l’ont créé et qui affectent encore de se dire ses amis ; il a ou il peut avoir au contraire le concours de bien des hommes d’autres nuances d’opinion qui, après avoir discuté et combattu la loi de prorogation telle qu’elle était, en acceptent sans arrière-pensée toutes les conséquences, qui n’avaient d’ailleurs hésité à la voter que parce qu’ils auraient voulu dès le premier moment cette organisation à laquelle il faut arriver aujourd’hui. Un manifeste qui a paru dans un journal de province, et qui exprime la pensée de M. Casimir Perier, le disait nettement il y a peu de jours : « Notre solution, c’est la consolidation de ce qui existe, c’est le maréchal de Mac-Mahon affermi dans son pouvoir, c’est la transmission de ce pouvoir mise à l’abri des surprises et des coups de main… » Quel est l’ami le plus intelligent, le plus prévoyant du septennat ? Est-ce M. Casimir Perier ? est-ce M. Lucien Brun ou M. Ferdinand Boyer ? Tout récemment, M. Laboulaye, traçant dans une lettre un tableau aussi net que décisif de la situation, prenait pour point de départ l’existence incontestée de ce gouvernement qu’il s’agit d’organiser, et en indiquant les conditions du concours de ceux qui pensent comme lui il ne se montrait certes pas exagéré ; c’était en conservateur, partisan décidé d’un pouvoir exécutif très fort, qu’il parlait. Dernièrement M. Germain, devant une réunion de maires du département de l’Ain, faisait les mêmes déclarations et le même acte d’adhésion au régime créé par la loi du 20 novembre. M. Dufaure a déjà exprimé ses opinions dans la commission des trente. Ces hommes ne sont pas les seuls, bien d’autres dans l’assemblée ont les mêmes pensées, les mêmes dispositions, et ne refuseraient pas les garanties les plus conservatrices au pouvoir de M. le président de la république. Maintenant donc toute la question est de savoir si l’organisation constitutionnelle, devenue une nécessité évidente, s’accomplira par quelque transaction nouvelle avec ceux qui n’ont d’autre souci que de l’annuler d’avance, ou avec ceux qui ont été les premiers à la demander, — avec les hommes qui reconnaissent le gouvernement dans son principe, dans sa durée, ou