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Les espèces minéralogiques que l’on vient de citer ne sont pas les seules que l’on rencontre dans le filon de Comstock. Il y a aussi la galène ou sulfure de plomb argentifère. N’oublions pas l’argent et l’or natifs, à l’état métallique presque pur, et en quelques points les pyrites, sulfures de fer, de cuivre, de zinc, argentifères et aurifères. Tous ces minerais sont rarement cristallisés, et les collectionneurs, les amateurs des belles espèces minérales, récoltent ici fort peu d’échantillons. Il en est de même pour toutes les mines de Nevada; celles d’Austin, si riches en argent rouge, celles de White-Pine en chlorure d’argent, n’ont jamais présenté ces magnifiques amas ou géodes, ces beaux spécimens si communs au Chili.

Le chlorure d’argent, qu’on appelle encore argent corné, — il est tendre et flexible comme la corne et se laisse couper au couteau, si bien que les mineurs hispano-américains ne le nomment que plataplomo ou argent-plomb, — le chlorure d’argent a été rencontré quelquefois en très grande abondance dans le filon de Comstock. On a trouvé inopinément dans ce filon des amas considérables de minerai chloruré presque pur, comme aussi d’argent sulfuré, qui ont en quelques jours enrichi les exploitans. Ces accumulations de minerai, riches, inattendues, sont ce que les Mexicains appellent des bonanzas. Parmi les plus célèbres, on cite celle de la mine de Valenciana, sur la Veta-Madre ou veine-mère de Guanajuato, au Mexique, qui de 1768 à 1810 produisit annuellement plus de 7 millions de francs, et transforma tout à coup le modeste señor Obregon, l’heureux propriétaire de cette mine, en comte de Valenciana, le plus riche des hommes de son temps. On cite encore la bonanza de Real-del-Monte, également sur la Veta-Madre du Mexique, qui fournit en douze ans, de 1759 à 1771, à don Pedro Torreros, depuis comte de Regla, la somme nette de 30 millions de francs; mais dans les entreprises souterraines, plus encore que dans les choses ordinaires de ce monde, les mauvais jours suivent de près les bons. Valenciana et Real-del-Monte, ces reines des mines mexicaines, commencèrent à déchoir lors de la guerre de l’indépendance, allumée dans toutes les colonies ibériques à la suite de la conquête de l’Espagne par Napoléon. Ces mines sont aujourd’hui remplies d’eau, et à diverses reprises des compagnies anglaises ont vainement tenté de les reprendre; on peut en dire autant de la plupart des mines du Pérou. En Nevada, les mauvais jours ne sont pas encore venus et ne viendront peut-être jamais, grâce à l’indomptable activité de la race anglo-américaine. J’ai vu, à la fin de 1868, à la mine de Yellow-Jacket, un amas de minerai d’argent chloruré qui s’étendait sur toute la largeur de la veine, et dont on tira des millions pendant plusieurs semaines. Les actions de la mine étaient tombées assez bas, et cette heureuse découverte les fit tout à coup remonter. Sur