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25,000, et parmi eux se distinguent les Brûlés et les Ogalalas. Les Corbeaux, les Gros-Ventres, les Têtes-Plates, les Nez-Percés, les Cœurs-d’Alène, les Pend’-d’Oreilles, les Pieds-Noirs[1], occupent, principalement dans le nord-ouest des prairies, les territoires d’Idaho, de Wyoming et de Montana, et offrent ensemble un chiffre de population inférieur à celui des Sioux, mais qu’on peut encore estimer à 20,000. Dans le centre et le sud, les Paunies, les Arrapahoes, les Chayennes, les Yutes, les Kayoways, les Comanches, les Apaches, les Navajoes, les Pueblos[2], atteignent tous ensemble le chiffre de 60,000. Le Nebraska, le Kansas, le Texas, les territoires de Colorado, du Nouveau-Mexique, d’Arizona, sont ceux que ces tribus parcourent ou sur lesquels elles sont installées. Les Paunies sont cantonnés dans le Nebraska, au voisinage du chemin de fer du Pacifique, et les Yutes dans le Colorado, dans les Parcs, plateaux boisés et gazonnés des Montagnes-Rocheuses. Entre le versant occidental de cette chaîne de montagnes et le Pacifique sont les Pah-Yutes, les Bannocks, les Serpens ou Shoshones, qui occupent surtout l’Utah et la Nevada, enfin les Indiens de la Californie, de l’Orégon et du territoire de Washington; prises ensemble, toutes ces tribus atteignent le chiffre d’environ 80,000 individus.

Il y a des degrés en tout, dans la barbarie comme dans la civilisation. La plupart des dernières tribus qu’on vient de nommer vivent dans une condition encore plus précaire que les premières; elles n’attendent leur nourriture que du hasard. Elles ne chassent guère, pèchent peu ; il est vrai que le bison est ici disparu, et que les rivières, sauf dans l’Orégon, ne sont pas poissonneuses. Comme les premiers hommes dont parle Ovide, ces Indiens se nourrissent de glands et vont jusqu’à manger des sauterelles, voire de la vermine. Ils arrachent à la terre vierge les maigres végétaux comestibles qu’ils peuvent y trouver, surtout des racines, et c’est pourquoi les Américains appellent tous ces sauvages Indian diggers, les Indiens piocheurs. Cette dénomination a du moins l’avantage d’être commode pour le classement des Indiens, et elle est généralement adoptée en Amérique. Ces tribus, restées ainsi au dernier échelon de la barbarie, ne vivent pas même sous la tente, elles s’abritent sous des cahutes en branchages; elles ont encore la pointe de flèche en obsidienne ou en silex, voire en cul de bouteille, et le mortier de lave volcanique pour broyer les glands.

Dès le premier jour, le droit du Peau-Rouge à l’occupation du soi qui l’a vu naître a été reconnu par les fondateurs des colonies

  1. Tous ces noms sont restés français.
  2. Ces deux dernières tribus ont conservé leurs noms espagnols.