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laisser aucune trace sur les proscynèmes du Sérapéum ; mais pour la XXVIe dynastie, qui commence avec ce même Psammétichus, quatre cents personnages de Memphis, dont aucun ne porte un nom étranger, et qui figurent sur les 168 stèles escortant le premier Apis de ce long règne, prouvent qu’il inaugura la restauration de la monarchie nationale, et coïncida avec l’expulsion des dominateurs éthiopiens.

Champollion avait distingué, dans son panthéon, et nommé la plupart des divinités égyptiennes; M. Wilkinson a complété ce premier travail; M. Lepsius a démontré que ces personnages divins formaient des groupes auxquels on pouvait donner le nom de triades locales dans les divers nômes où ils étaient adorés; enfin M. Birch a publié à son tour, dans sa Galerie du British Museum, des résumés qui sont une des meilleures sources auxquelles il soit permis de puiser encore aujourd’hui. Tous ces travaux n’étaient en quelque sorte que la constatation des faits observables pour tous sur le nombre, les attributs et les répartitions des dieux de l’Egypte ; c’est la science française qui, la première encore, portant le flambeau dans les entrailles de la terre, a dégagé des textes et des peintures du Sérapéum les dogmes de l’incarnation et de la trinité divines.

M. Mariette avait remarqué sur quelques-unes de ces stèles un personnage féminin de forme humaine avec une tête de génisse supportant entre ses cornes le disque lunaire. Cette figure est assise, et tient de la main droite la croix ansée, de la gauche le sceptre à tête de lévrier, signes de la divinité. C’est donc une déesse. Elle est étroitement liée au taureau sacré et ne se rencontre jamais sans lui; Apis « semble marcher en partant d’elle. » Élien est le seul, parmi les écrivains classiques, qui ait parlé des épouses d’Apis; Pline, Ammien Marcellin et Solin nous apprennent qu’on présentait des génisses au taureau divin, mais qu’elles étaient mises à mort sans qu’il y eût eu de rapprochement. En effet, s’il eût connu des épouses charnelles, qu’auraient été ses produits? Évidemment des Apis, et il y aurait eu plusieurs Apis, ce qui n’était pas. D’ailleurs Strabon dit qu’une partie du temple de Memphis était réservée à la mère d’Apis. Ce dernier témoignage est confirmé par le texte d’un monument trouvé au nord du Sérapéum : c’est la tombe d’un personnage qualifié de prophète de la mère d’Apis. Donc Apis avait une mère, qui était déesse, et était elle-même l’objet d’un culte avec ses prêtres attitrés. Qu’était-ce maintenant qu’Apis? L’auteur du livre de Isidi et Osiridi nous dit qu’on entretenait à Memphis « le taureau Apis, image d’Osiris, » que le nom de Sérapis était composé de ceux d’Apis et d’Osiris, et que les prêtres justifiaient ce point de doctrine en alléguant qu’A-