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mine le Scamandre et a vue d’une part sur l’Hellespont, de l’autre sur Ténédos et la mer Égée. Les fouilles ont fait reconnaître autour d’elle le mur d’enceinte de la ville grecque, bâti, selon toute apparence, par Lysimaque. Comprise dans cette enceinte et habitée également par les Grecs, elle est couverte par la couche hellénique, qui généralement y atteint une épaisseur presque uniforme de deux mètres. C’est là sans aucun doute que les fouilles devaient être dirigées. M. Schliemann les commença en 1870 par une tranchée au nord-ouest. Il atteignit d’abord le mur de Lysimaque, reconnaissable à l’appareil de la construction, puis un autre mur qui de même paraissait extérieur à la citadelle primitive et qui reposait sur des décombres. Les objets trouvés dans cette première fouille indiquaient nettement aussi que la place avait été habitée avant la fondation de la colonie grecque. Ce fut un encouragement pour M. Schliemann.

L’année suivante, il ouvrit du côté du nord une immense tranchée figurant une sorte de plate-forme large de 70 mètres et à 14 mètres au-dessous du niveau de la colline. Derrière un mur grec de soutènement, il atteignit un mur grossièrement construit à la façon des murailles cyclopéennes, et, l’ayant franchi, il vit se dessiner devant lui sur la tranche verticale du terrain des couches de décombres antérieures à la colonie grecque et contenant des murs de maisons superposées les unes aux autres. On pouvait distinguer aisément trois assises de débris au-dessous de la couche hellénique ; la plus basse, reposant sur le rocher, est composée de terre, de poteries et d’autres objets dont je parlerai tout à l’heure ; la seconde, de plusieurs mètres d’épaisseur comme la première, est toute formée de cendres rouges, de fragmens de charbon et de terre argileuse brûlée par un immense incendie. Les maisons qu’elle renferme, et qui sont presque toujours à angles aigus ou obtus, sont faites de briques crues dont la surface seule a été cuite par la chaleur du brasier. Les vases et les autres objets qui s’y trouvent portent presque tous la trace du feu. La troisième couche est faite de terre ; les maisons qu’elle recouvre, reposant immédiatement sur la seconde, sont construites en petites pierres non taillées réunies par de la boue ; les murs ont un enduit d’argile à l’intérieur, mais l’extérieur est nu. Cette couche a généralement 3 mètres d’épaisseur. Une quatrième assise, épaisse de 2 mètres, semble être la continuation de la précédente. Entre elle et la couche hellénique, on rencontre quelques vases auxquels on attribuerait volontiers une origine lydienne ; cela formerait une cinquième assise très mince, au-dessus de laquelle est la couche gréco-romaine, qui forme la surface de toute la colline.

La même année, M. Schliemann entreprit du côté du sud une