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dessiccation, la meilleure qualité des produits, le moindre danger d’invasion par l’oïdium ; ce serait renoncer à ces avantages et reculer vers une pratique condamnée que de substituer aux souches basses les pittoresques guirlandes enlacées aux rameaux des ormes, des châtaigniers ou des saules. Ce qu’il y de vrai dans cette idée de l’immunité des treilles et des hautains, c’est que toute vigne résiste à cet insecte en raison de l’abondance du système radiculaire, et que cette condition est peut-être mieux remplie par des pieds plus espacés et plus hauts que par des ceps ravalés en buisson et rapprochés en rangs serrés. D’ailleurs le système de taille à long ou à court bois est affaire de convenance locale et de variétés de vigne. Si l’on devait recommander pour nos variétés méridionales un traitement propre à les faire résister plus longtemps au phylloxera déjà établi sur les racines, ce serait non la taille longue, épuisante de sa nature, mais la taille courte plus sévère que d’habitude, pour mieux équilibrer la végétation des pampres avec la moindre force des racines.

Quant au rôle qu’on a voulu attribuer aux intempéries des saisons, il est facile de reconnaître l’action nuisible de certains excès de chaud ou de froid, de sécheresse ou d’humidité, dans la production de beaucoup d’altérations organiques des végétaux ; mais ces actions sont visibles et se traduisent le plus souvent par des symptômes définis, — gélivure, brûlure, jaunisse, rabougrissement temporaire cessant avec le retour des conditions climatériques favorables. Tout autres sont les effets directs du phylloxera ; ils portent d’abord sur les racines dans les terrains humides ou secs à tous les degrés ; le rabougrissement des pampres n’est qu’un résultat de la suppression des principaux suçoirs de la plante, c’est-à-dire des radicelles, et plus tard des racines petites et moyennes.

Les hivers les plus froids, les étés les plus chauds, n’ont pas anéanti l’implacable insecte, non plus qu’ils ne l’ont créé. Ces conditions climatériques, comme celles du milieu en général, influent sans doute sur la propagation de l’ennemi et sur la résistance variable de la victime ; mais conclure de là que le phylloxera n’est qu’un effet, ce serait comme si l’on disait que la malpropreté fait naître des animaux, sous prétexte qu’elle en favorise la multiplication. Que l’état de souffrance des arbres soit parfois la cause que certains insectes les attaquent de préférence aux arbres sains, c’est ce que l’on ne songe pas à nier. Les coléoptères, dits xylophages, sont remarquables par cet instinct qui leur fait chercher comme victimes les arbres à sève altérée, à constitution maladive ; on pourrait, dans une certaine mesure, en dire autant des larves de longicornes, des buprestes, dont les dents voraces s’exercent sur des bois un peu altérés plus souvent que sur les bois sains ; mais l’assimilation se-