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un examen les questions de droit soulevées par la capture du Virginius. Après avoir tout épuisé, il a bien été obligé en fin de compte de s’exécuter, et le général Grant, dans son dernier message, annonce que l’Espagne s’est résignée à donner toutes les satisfactions qu’on réclamait : restitution du Virginius, livraison des passagers et hommes d’équipage survivans, indemnités à ceux qui ont été lésés, réparation au pavillon américain, châtiment des autorités espagnoles coupables des actes de violence qui ont été commis. Faire accepter toutes ces conditions à Cuba semblait difficile au premier abord. Les esprits cependant paraissent s’être calmés, et le Virginius a été restitué. Tout en étant rigoureux du reste, le gouvernement de Washington n’est point sans garder quelques ménagemens envers l’Espagne, et surtout il n’a paru nullement pressé de saisir cette occasion facile pour intervenir à Cuba. Maintenant c’est l’Angleterre qui réclame à son tour au nom de ses nationaux qui ont été victimes, et le cabinet de Madrid sera encore obligé de rendre les armes devant l’Angleterre. M. Castelar a sûrement agi avec sagesse, et cependant il n’est pas certain que cette prudence nécessaire serve à le populariser.

Que pouvait faire l’Espagne ? Cette malheureuse république qui existe à Madrid n’a même pas de forces suffisantes pour maintenir son autorité dans ses provinces continentales. Elle a tout ce qu’il faut de troupes pour entretenir la guerre civile, non pour la dénouer. On vient d’envoyer un nouveau général à Carthagène, dont on continue à faire le siège, où les insurgés communistes se défendent toujours sans paraître jusqu’ici donner des signes d’épuisement. Au nord, Moriones continue plus que jamais à batailler avec les bandes carlistes, et plus que jamais les bandes carlistes continuent à se promener dans la Biscaye, dans la Navarre, dans le Bas-Aragon, en Catalogne, dans le Maestrazgo. Les troupes du gouvernement sont réduites à faire de véritables campagnes pour ravitailler les villes. Il est vrai que de leur côté les carlistes, en restant maîtres de leurs positions, n’avancent guère. Entre ces étranges adversaires la lutte semble égale : ils se tiennent en échec, ils ne réussissent pas à se vaincre mutuellement. Cependant il y a toujours à Madrid un gouvernement qui s’appelle la république, qui vit au milieu de toutes ces complications.

ch. de mazade.

Le directeur-gérant, C. Buloz.