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Ce qui doit tout particulièrement nous faire réfléchir, c’est que la Prusse a commencé par un baccalauréat assez semblable au nôtre. Jusqu’en 1812, les universités étaient chargées d’examiner elles-mêmes les jeunes gens qui se présentaient pour suivre les cours ; mais la plus grande irrégularité et des abus de toute sorte s’étaient introduits dans ces examens. Sans compter qu’il est toujours périlleux de charger les corporations d’une tâche où leur devoir peut entrer en conflit avec leur intérêt, les universités s’acquittaient mal d’une fonction qu’elles regardaient avec raison comme accessoire et comme étrangère à leur vraie destination. Guillaume de Humboldt, alors ministre de l’instruction publique, assembla une commission, où il appela entre autres Ancillon, Schleiermacher et J.-A. Wolf, pour élaborer un nouveau règlement. Le fruit de ses délibérations fut le règlement de 1812, qui transporta l’examen dans les établissemens d’instruction secondaire, en laissant toutefois subsister des commissions mixtes, mi-partie composées de professeurs de l’université et de directeurs et maîtres du gymnase, auprès desquelles pouvaient se présenter les jeunes gens qui ne sortaient pas directement du collège. Ce fut un progrès ; mais, ainsi qu’on eût pu le prévoir, la commission mixte attira tous les candidats mal préparés. Beaucoup de jeunes gens quittaient le gymnase avant l’heure, et, après avoir laissé passer l’intervalle exigé par la loi, ils se présentaient devant ce jury, à tort ou à raison réputé plus indulgent. Des plaintes s’élevèrent de tous les côtés. Les directeurs de gymnase voyaient déserter les hautes c’asses ; d’un autre côté, les commissions, en 1825, se plaignirent « d’être obligées d’examiner des hommes qui voulaient se faire meuniers, brasseurs, fermiers, qui étaient à peine mûrs pour la sixième, et qui n’avaient d’autre intention, en se présentant aux épreuves, que d’obtenir le droit au volontariat d’un an. »

Après différens palliatifs, on arriva enfin à la conviction qu’il fallait réformer le système. En 1831, le ministre Altenstein commença une enquête pour laquelle il recueillit les avis des universités, des commissions d’examen, des gymnases, et après trois ans de délibération et d’étude fut édictée la loi de 1834, qui est encore en vigueur aujourd’hui et dont nous venons d’exposer l’économie. L’examen fut exclusivement réservé aux gymnases. Ce qui prouve que cette fois on avait trouvé juste, c’est que toutes les retouches postérieures sont destinées à appuyer dans le même sens, en diminuant la part de l’examen et en renforçant l’importance des notes du collège. La disposition qui veut qu’on présente tous les devoirs faits pendant les deux dernières années est de 1841. En 1856, on retranche de l’examen oral l’allemand, le français, la philosophie, la physique, l’histoire naturelle. Il est visible que le gymnase a grandi en autorité et qu’on lui marque plus de confiance.