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poursuite pour la rentrée des impôts et l’augmentation du rendement des impôts indirects, comparé avec le produit des exercices précédens et les prévisions budgétaires. L’élévation ou la diminution des impôts indirects est le thermomètre de la prospérité intérieure. De 1852 à 1869, la progression a été constante. La seconde république les laissait à 740 millions, et le second empire à 1,330. En 1872, où les besoins de la consommation devaient être d’autant plus grands que le pays avait subi une diète de dix-huit mois, les anciens impôts indirects n’ont pas produit plus de 1 milliard 250 millions ; en 1873, on n’atteindra pas encore les chiffres de 1869 ; cependant, si l’on se rappelle qu’à côté du chiffre des anciens et des nouveaux impôts le pays a fait face aux versemens de deux emprunts énormes, qu’il n’a cessé d’augmenter ses dépôts dans toutes les sociétés de crédit, tout en produisant plus que jamais, on demeurera convaincu que la charge nouvelle n’a pas dépassé ses forces.

C’est ici le lieu de remarquer que, par suite d’opinions très contraires et de la difficulté de les mettre d’accord, on n’a guère innové dans les caractères des impôts nouveaux. Rien n’est plus malaisé en effet que de créer un impôt : les uns cherchent à lui donner pour base « la justice, » les autres la facilité de perception. Le principe de la justice mérite tous respects ; mais il conviendrait bien à ce sujet de modifier un mot célèbre et de dire : O justice, que d’erreurs on commet en ton nom ! Le gouvernement en 1871 s’était gardé de frapper la propriété foncière. Respecter la propriété territoriale et les denrées alimentaires était son premier devoir. En 1873, le ministre des finances revint à une autre pensée, il voulait au contraire imposer la contribution foncière, celle des portes et fenêtres et la contribution personnelle. Quoi de plus juste en apparence, lorsqu’on accroît les impôts indirects, de demander aussi un sacrifice annuel aux impôts directs ? Et cependant qui doute qu’une surcharge de ce genre soit autre chose qu’une contribution en capital prélevée sur les possesseurs d’immeubles ? Par cela seul que les impôts immobiliers sont frappés d’une surtaxe, la valeur des immeubles en diminue d’autant. Toute mutation qui survient dans la propriété entraîne alors une perte de capital qui ne sera jamais compensée ; rien n’est donc moins juste que de demander aux uns un sacrifice forcé en capital et aux autres seulement un prix plus élevé de consommations volontaires. L’assemblée nationale n’a point accueilli les surtaxes des impôts directs ; cependant elle avait voté le 29 mai 1872 une nouvelle charge de 60 centimes sur l’impôt des patentes ; or dès cette année la charge a paru si lourde que le ministre dès finances a proposé de réduire les 60 centimes à 43 et de réviser la loi entière. C’est par esprit de justice aussi et pour faire payer aux industriels étrangers les surtaxes imposées à l’industrie