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M. de Prokesch avait ordre de demander immédiatement ses passeports. M. de Manteuffel fut atterré. Il essaya pourtant de résister un peu, il voulait n’accorder qu’une partie et réserver le reste. Dissoudre l’union restreinte, il n’y répugnait pas, pensant que la question demeurait ouverte et qu’on pouvait chercher une autre forme d’organisation fédérale où la Prusse reprendrait son rang ; mais reconnaître la diète ! mais évacuer la Hesse ! La diète reconnue, c’était le retour à l’ancien régime, c’était la violation des promesses éclatantes que le roi de Prusse avait tant de fois renouvelées à son peuple et aux peuples d’Allemagne ; la Hesse évacuée, c’était peut-être une révolution à Berlin. M. de Manteuffel parlementa de son mieux dans la journée du 9, promettant de dissoudre l’union restreinte, demandant grâce pour le reste. M. de Prokesch fut impitoyable ; il réclama ses passeports dans la soirée même, et il fallut l’intervention personnelle du roi pour qu’il consentît à attendre deux jours de plus.

Le lendemain 10 novembre, M. de Manteuffel adresse au représentant de la Prusse à Vienne la dépêche qui doit être lue au prince de Schwarzenberg : « La Prusse dissoudra l’union restreinte, elle ne s’opposera point à ce que l’Autriche exécute en Hesse les décisions de la diète, mais elle continuera d’occuper les routes d’étapes ; elle demande en outre que les conférences ministérielles destinées à reconstituer l’autorité centrale en Allemagne se tiennent sur un territoire neutre, non pas à Vienne, mais à Dresde. » Sans attendre la réponse du prince de Schwarzenberg, impatient de montrer son bon vouloir en courant au-devant de ses désirs, le ministre prussien s’empresse de prendre les mesures qui auront pour effet de dissoudre l’union restreinte. Le collège des représentans des princes, un des organes de l’union, est convoqué le 15 novembre. A défaut de M. de Sydow, commissaire prussien auprès de l’assemblée, qui refuse de remplir cette mission, M. de Bülow annonce solennellement aux nobles membres « que le projet de constitution allemande annexé au traité du 26 mars 1849 est abandonné par la Prusse et qu’un nouveau projet sera préparé de concert avec l’Autriche en des conférences ministérielles. » Cependant, au cas où le prince de Schwarzenberg, qui n’a pas encore répondu, persisterait dans sa politique sans pitié, ne se reprocherait-on pas d’avoir congédié si vite les états qui composaient le Sonderbund prussien ? La déclaration communiquée par M. de Bülow insinue donc que l’union subsiste toujours, que le lien n’est pas rompu entre la Prusse et les états associés à ses efforts, que la Prusse compte sur eux pour défendre leurs intérêts communs contre les agressions du dedans ou du dehors, que des circonstances prochaines peut-être resserreront encore ces alliances naturelles. Le document que nous analysons se termine