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REVUE DES DEUX MONDES.

ESSAIS ET NOTICES.

Histoire de l’ambulance américaine établie à Paris pendant le siége de 1870-71, ses méthodes et ses travaux, par M. Thomas W. Evans. Londres 1873.


Ce beau livre, qui sort des presses de Chiswick, est le premier volume d’un ouvrage qui a pour titre les Associations sanitaires pendant la guerre de 1870-71. Il renferme six chapitres : l’établissement du comité sanitaire américain et international de Paris, et l’histoire de l’ambulance américaine, — les hôpitaux des armées, — les tentes et les tentes-baraques, — l’organisation spéciale de l’ambulance américaine, — l’histoire de l’ambulance américaine au point de vue chirurgical, — l’histoire de l’ambulance au point de vue médical. Les deux chapitres sur les hôpitaux, les tentes et les tentes-baraques, dus au docteur Crane, sont de véritables mémoires historiques ; ils renferment les renseignemens les plus précis, avec l’indication de toutes les sources où l’auteur a puisé, sur le matériel et sur l’organisation du service hospitalier en temps de guerre, depuis les temps les plus anciens jusqu’à nos jours, et dans tous les pays. Même sans remonter aux âges lointains, on trouvera dans ces chapitres les tableaux les plus lamentables. En temps de paix, on écoute la voix de l’humanité, on prépare mille moyens pour diminuer les souffrances des victimes de la guerre future ; mais une fois les hommes aux prises, quand les instincts sauvages qui dorment dans les cœurs ont repris tout leur empire, les droits sacrés des blessés sont trop souvent oubliés. J’ai entendu raconter par un témoin oculaire que, pendant la campagne de Russie, un intendant parlait à un officier de l’état-major de Napoléon de blessés à enlever. « Les blessés, reprit l’officier avec impatience, l’empereur en a fait le sacrifice ! » Les mémoires de chirurgie militaire de Larrey sont remplis des détails les plus navrans ; six jours après la bataille d’Eylau, on n’avait pas encore pu lever le premier bandage des blessés transportés à Thorn ; Larrey les peint pleurant, gémissant, implorant la mort.

Un décret du 24 thermidor an VIII avait organisé : 1o les ambulances volantes, où les blessés devaient être portés du champ de bataille ; 2o les dépôts d’ambulances, sortes de quartiers-généraux des ambulances volantes, placés derrière le centre de l’armée ; 3o les hôpitaux sédentaires, où l’on devait verser le plus promptement possible les blessés transportables. Cette organisation, excellente en théorie, n’a jamais en pratique pu recevoir une application parfaite. La guerre transporte souvent les combattans trop loin de bons hôpitaux permanens. Dans la campagne de Crimée, les difficultés surgirent de toutes parts, le docteur Chenu les a fait ressortir dans un livre excellent : de la Mortalité dans l’armée