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problématique. Avec les décoctions de plantes acres comme le tabac, les feuilles de noyer, l’aloès, on n’a pas été plus heureux qu’avec les autres substances.

Il n’est pas difficile d’expliquer ici l’insuffisance des toxiques. Enfouis dans la terre, les phylloxères doivent échapper au contact prolongé des liquides ; ils ne souffrent pas du contact de matières solides qui ne sont pas réduites en une poudre tellement impalpable qu’elle obstrue les orifices respiratoires. Les agens chimiques ont en général peu d’action sur les tégumens des insectes. Chez les kermès et chez beaucoup de pucerons, la peau se revêt d’une sorte de cire qui l’empêche d’être mouillée. À ce point de vue, le phylloxère n’a pas été bien examiné, mais selon toute probabilité il n’est pas moins favorisé de la nature que les kermès et certains pucerons.

Les gaz avec le danger des émanations ne semblent guère appelés à rendre de notables services. Les insectes résistent d’une façon surprenante à l’asphyxie ; sans périr, ils suspendent leur respiration pendant des journées entières, et, noyés dans un gaz délétère, ils ne succombent qu’après un temps fort long. C’est là une vérité scientifique établie par une multitude d’expériences. Les corps gras ont une action certaine, seulement il paraît malaisé d’imprégner d’huile les phylloxères, comme il serait indispensable de le. faire, sans porter préjudice au végétal. On voudrait néanmoins de ce côté que des essais fussent entrepris avec méthode ; peut-être obtiendrait-on un bon résultat de l’emploi de tourteaux oléagineux.

Quelques investigateurs se sont inquiétés de moyens mécaniques capables d’empêcher les phylloxères de se porter d’une souche à l’autre. Il est permis en effet de croire que des cordons de sable seraient un obstacle à des voyages souterrains ; mais si, comme on l’a vu, les insectes montent volontiers sur le sol, le but pourrait n’être pas atteint après un énorme travail. On sait que la larve du hanneton et diverses chenilles qui se nourrissent de racines ne peuvent vivre dans des terres absolument compactes, il a donc paru possible de se défendre contre le destructeur de la vigne par le tassement de la terre : c’est douteux ; cependant il faudrait s’en assurer. Pour tous les agriculteurs, ces moyens mécaniques étaient faciles à soumettre au contrôle de l’expérience ; ils n’y ont pas encore songé. L’idée est venue de prendre au piège les phylloxères : selon toute apparence l’idée ne fera pas fortune.

Un procédé de destruction fort recommandé est à la fois énergique et d’une grande simplicité. Un sacrifice à faire, rien de plus. Arrachez les vignes malades, et par le feu faites-en disparaître jusqu’à la trace, se sont écriés divers agriculteurs. Ainsi, pensait-on, d’un seul coup le fléau disparaîtra des champs infestés et cessera de menacer les territoires encore épargnés. En plusieurs rencontres,