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UNE VISITE
AU
PARLEMENT D'ALLEMAGNE

Le parlement de l’empire d’Allemagne attend encore son palais, dont l’emplacement n’est pas même choisi. M. de Bismarck voulait qu’on l’élevât dans le Thiergarten, non loin de la fameuse colonne triomphale, dont l’architecture ne trouve guère d’admirateurs, même parmi les Berlinois, peuple léger d’ailleurs et fort enclin à la médisance ; mais le projet du chancelier se heurta contre une opposition unanime. Les députés ont-ils des préjugés contre le Thiergarten ? Craignent-ils les torrens de poussière et de sable que chaque souffle d’air et chaque pas soulèvent dans ce lieu de plaisance, ou bien l’odeur que dégagent les eaux croupissantes au-dessus desquelles on voit la nuit flotter des feux follets ? Toujours est-il que l’émotion fut grande parmi les mandataires du peuple allemand. La ville n’était pas moins inquiète, car, pour bâtir le palais à l’endroit marqué, il eût fallu vouer au marteau des démolisseurs rétablissement de M. Kroll ; or le beau monde aime à s’entasser le soir dans le jardin de la maison, jardin rare en effet, où l’on ne sait quoi le plus admirer des nénufars en zinc qui portent des verres de couleur ou des canards de même métal qui nagent dans une mare d’imitation ; On a donc crié, pétitionné, et l’empereur d’Allemagne, se souvenant du roi de Prusse, a fait grâce au jardin menacé. Les Berlinois conserveront Kroll, et le parlement de l’empire, attendra. On a pour son usage provisoirement accommodé une ancienne manufacture de porcelaine, tout près du ministère de la guerre. Le bâtiment est de médiocre apparence, et fait pauvre mine à côté de son voisin, mais c’est justice : il convient qu’un fils se tienne