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veille des vacances, et qui doivent être mises à l’ordre du jour à la rentrée de l’assemblée.

C’est un rendez-vous naturel, c’est l’occasion la plus simple pour définir et fixer un peu l’état du pays dans des conditions où la France, délivrée des fantômes dont on l’obsède, puisse vivre sans trouble, avec un pouvoir respecté, avec des institutions parlementaires régularisées, Que les royalistes à outrance se soient trop hâtés de combattre cette idée, dès qu’ils l’ont vue poindre, précisément parce qu’elle déjouait ce calcul qui consiste à placer la France entre la monarchie traditionnelle et l’anarchie ; c’est possible ; mais certainement une partie de la droite, déçue dans ses tentatives pour rétablir une monarchie raisonnable, se rallierait à ces combinaisons protectrices auxquelles ne manquerait pas d’un autre côté sans nul doute l’appui des fractions républicaines modérées, surtout du centre gauche. Dussent les radicaux aller rejoindre les légitimistes extrêmes dans un vote négatif, l’organisation nouvelle ne sortirait pas moins victorieuse du scrutin. On reviendrait ainsi, après quelques détours, aux seules choses possibles pour le moment.

De toute façon, l’heure est venue pour le gouvernement de se décider, s’il ne veut être devancé et entraîné dans des luttes violentes où il disparaîtrait bientôt lui-même. Jusqu’ici, il a évité de se prononcer, il est resté neutre au moins comme gouvernement, puisqu’il est bien clair que chacun des membres du ministère a son opinion. Il ne peut plus cependant s’enfermer dans cette neutralité, qui ressemblerait à une abdication. Il est tenu de dire ce qu’il veut, ce qu’il se propose de faire. C’est à lui de prendre l’initiative dès le premier instant où l’assemblée se trouvera de nouveau réunie à Versailles, ne fût-ce que pour couper court à des débats sans issue, à des violences de partis qui ne seraient qu’une cause d’excitation nouvelle et d’agitation stérile. Les circonstances commencent à devenir pressantes d’ailleurs, Les élections de ces jours derniers, toutes républicaines, même assez radicales si l’on veut, sont un symptôme d’impatience bien plus que le signe de la puissance réelle des idées révolutionnaires. On ne comptera pas apparemment parmi les victoires signalées du radicalisme l’élection de M. de Rémusat à Toulouse. Tant qu’il n’y aura que des radicaux de ce genre, le péril ne sera pas bien grand. Dans tous les cas, le meilleur moyen d’en finir avec tous ces entraînemens et ces obscurités du scrutin, c’est de leur opposer la netteté, la clarté du langage et de l’attitude, c’est d’en revenir le plus tôt qu’on pourra à l’œuvre trop abandonnée de la réorganisation nationale dans des conditions fixées et coordonnées, où une politique fortement, libéralement conservatrice puisse se déployer sans avoir à se débattre avec des soupçons et avec des ombres.

Ces grands débats de la politique, où se décideront les destinées de la France, s’ouvriront bientôt à Versailles, et en attendant on a là tout près le grand drame judiciaire et militaire qui vient de s’ouvrir à Tria-