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reconnut le caractère asiatique des monumens étrusques et les rapprocha des cylindres assyriens et babyloniens. Or l’origine lydienne des Étrusques, dont témoigne déjà Hérodote, ne saurait plus être sérieusement contestée. L’art importé en Toscane, dont la parenté avec l’art assyrien avait frappé Micali, était bien celui de la Lydie, sorte de province du grand empire sémitique d’Assur. Les Ioniens de l’Asie~Mineure n’en avaient guère connu d’autre ; les sculpteurs et les peintres de vases du royaume de Candaule ou de Crésus leur avaient fourni des modèles et transmis des traditions : de là l’affinité entre l’art étrusque et l’art primitif des Hellènes. Raoul Rochette, un peu enclin à exagérer la part qui revient ici à la Phénicie, restitua du moins à l’Assyrie ce que les antiquaires des deux derniers siècles avaient attribué à l’Égypte. Félix Lajard avait également reconnu le caractère assyrien des coupes d’argent doré trouvées dans les tombeaux de Ceri. En 1847, Gerhard regardait comme incontestable l’analogie qui existe entre les plus anciennes peintures de vases grecs et les monumens assyriens. Dans les relations de Corinthe avec l’Asie-Mineure, il voyait un motif d’appeler plutôt lydo-babyloniens que phénico-babyloniens les vases peints d’ancien style. Les types de l’art grec et toscan, si souvent cherchés en Égypte et en Phénicie, avaient été retrouvés à Babylone, à Ninive, à Persépolis. L’influence très réelle de la Phénicie sur la Crète, et partant sur les Grecs des îles de l’Archipel, ne pouvait être comparée à celle de la Lydie et de la Lycie sur l’Argolide, sur Corinthe et l’Etrurie. Les figures ailées, les taureaux à face humaine, les griffons, les personnages finissant en poissons ou en reptiles, faisaient penser aux religions de la vallée du Tigre et de l’Euphrate bien plus qu’à celles de la Phénicie, quoique de même origine. Gerhard reconnaissait qu’aux âges reculés l’habileté merveilleuse des Phéniciens à travailler l’airain, l’or, l’ivoire et le verre n’avait pas été perdue pour les Hellènes ; mais cette influence s’était évanouie, et c’était en d’autres contrées, chez les peuples de l’Asie-Mineure, maîtres des routes commerciales qui passaient par Comana et Tarse pour atteindre Ninive et Babylone, qu’il convenait de chercher les principaux types de l’art grec.

Layard en Angleterre, M. de Longpérier en France, achevèrent de prouver l’origine assyrienne des arts de la Grèce et de la Perse. Layard distinguait deux époques dans l’influence exercée par l’Assyrie sur l’Asie-Mineure : l’une directe, pendant la domination de Ninive dans la péninsule, — l’autre indirecte, au temps de l’empire des Achéménides. Parmi les monumens encore si peu nombreux de la première période, il citait les bas-reliefs de la Ptérie, en Cappadoce : il reconnaissait une parenté évidente entre les divinités ou les emblèmes sacrés de cette sculpture et les symboles religieux