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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




30 septembre 1873.

La France est déjà sortie de bien des crises meurtrières où elle semblait devoir sombrer. Elle sortira encore de celle qu’elle traverse aujourd’hui ; elle en sortira, nous garderons jusqu’au bout cette espérance, sans y laisser ni son repos ni sa liberté. Elle retrouvera des conditions moins incertaines, des institutions plus précises, et avec une existence intérieure régularisée elle reprendra naturellement son rôle dans le monde ; elle reviendra occuper parmi les peuples cette place qu’elle a momentanément laissée vide, que personne n’a usurpée pendant son deuil. Une nation qui résiste à des coups comme ceux dont la France a été atteinte, qui au lendemain des plus accablantes épreuves déploie cette énergie au travail, cette fécondité de ressources, et qui a son bon sens, cette nation n’est pas près de périr pour quelques difficultés d’organisation. Elle n’est pas de celles qui se laissent brusquement déconcerter par une épreuve de plus ou de moins, et de toutes les paroles qui ont été prononcées depuis quelque temps dans les réunions de toute sorte, dans les conseils-généraux, dans les comices agricoles, partout où l’on fait des discours, une des plus sages, une des plus patriotiques, est cette parole que M. Thiers adressait l’autre jour à des habitans de la Savoie qui étaient allés le voir jusqu’en Suisse : « je vous dirai que l’avenir de notre pays ne m’inspire pas les mêmes inquiétudes que bien des personnes paraissent éprouver. L’avenir appartient au calme et à la modération… » Cet optimisme tranquille et généreux vaut mieux que toutes les lamentations. C’est un acte de foi à la France et à sa fortune en même temps qu’à la puissance des idées de libérale modération. M. Buffet dans son comice des Vosges, M. le duc de Broglie dans son comice de Bernay, ont prononcé à leur tour des paroles empreintes d’une certaine réserve obligée dans leur situation, rassurantes après tout, tranquillisantes pour le pays, écartant toute idée d’aventure, et aussi tout ce qui pourrait inquiéter la société moderne.