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cents médecins anglais dans les différens gouvernemens de l’Inde. On y lit ceci : « Le corps humain semble être le principal moyen de reproduction, de multiplication et de dissémination du poison. Cela a été déjà entièrement prouvé par l’histoire du progrès des épidémies qui ont sévi aux Indes, en Europe et en Amérique. L’histoire de l’épidémie de Hurdwar en 1867 a démontré que la maladie rayonne d’un seul point dans les directions prises par les voyageurs. Il y a des faits très nombreux et parfaitement établis qui démontrent que le poison avait été mêlé à l’eau de certains puits ou réservoirs, et que ceux qui ont ou de cette eau ont contracté le choléra. L’épidémie qui débuta à Hurdwar nous offre des exemples de villageois pris de choléra deux jours après l’infection des étangs des villages. Ces étangs avaient été infectés soit par des pèlerins qui s’y étaient baignés, soit par des vêtemens de cholériques qu’on y avait lavés. » M. Blanc examine d’autre part les causes diverses qui semblent avoir quelque rapport avec le degré de violence d’une explosion cholérique, et il conclut de la discussion des faits que, si certaines conditions hygiéniques mauvaises, si certains états du sol ou de l’atmosphère peuvent avoir de l’influence sur une épidémie, ils n’en sauraient aucunement provoquer la genèse ou déterminer la marche. C’est par l’homme et les eaux qu’il infecte que le choléra se propage essentiellement, et non point par un miasme errant capricieusement dans l’atmosphère.

S’il en est ainsi, la prophylaxie du choléra devient chose aisée. M. Blanc déclare en effet que peu d’épidémies sont aussi faciles à éviter que le choléra, si l’on veut prendre un peu de peine. Il suffit de désinfecter avec énergie toutes les évacuations cholériques, d’éviter l’encombrement des malades atteints de choléra, de veiller avec le plus grand soin à ce que l’eau potable soit préservée de tout contact avec des objets ayant servi aux malades, enfin de faire observer partout les préceptes d’une rigoureuse hygiène. M. Blanc cite plusieurs exemples de disparition complète du choléra dans des localités de l’Inde où il avait réussi à faire prévaloir ces principes. Il parle aussi de l’heureuse efficacité du changement de localité. Quand des cas de choléra se déclarent dans une station militaire de l’Inde, les troupes quittent leurs casernes et vont se loger sous des tentes à quelques kilomètres de là Si de nouveaux cas ne surviennent plus après quelques jours, les casernes sont nettoyées et désinfectées, et les troupes y retournent. Si de nouveaux cas sont constatés dans le campement, celui-ci est changé et reporté quelques kilomètres plus loin, jusqu’à disparition complète du choléra.

M. Blanc raconte à ce sujet qu’en juin 1866 il était en Abyssinie, au camp de l’empereur Théodoros, qui le retenait captif. Le camp était installé à Zagé, près du lac Tana, dans un endroit bas et