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roi évincèrent les grands-officiers du comte ou du duc. Charles V ne voulut même pas que les officiers de la cour des princes du sang conservassent la juridiction privée qui leur appartenait comme aux anciens grands-officiers du palais du roi, et il ordonna que tous les procès qui intéresseraient l’hôtel de ces princes ressortiraient au prévôt de Paris.

Le régime purement féodal avait donc commencé à faire place à un régime différent, où perçait déjà l’esprit de centralisation. Une organisation judiciaire et administrative nouvelle succédait à la hiérarchie qui s’était établie dans chaque grand fief, le domaine du roi compris, et l’administration de celui-ci perdait en même temps son caractère domestique.


II

Plusieurs des grands-officiers de la cour de France demeurèrent, après la transformation qui vient d’être signalée, en possession de fonctions gouvernementales. Si le sénéchalat était aboli, il y avait encore le connétable, les maréchaux, le grand-chancelier, le grand-bouteiller ; mais les attributions d’un ordre plus élevé que ces grands-officiers reçurent leur enlevèrent le caractère d’officiers du palais. Ils devinrent réellement de grands dignitaires de l’état, et c’est à ce titre que le nom de plusieurs d’entre eux se trouve mentionné au bas des diplômes royaux. Le connétable, qui en sa qualité de chef de l’écurie royale avait le commandement de la cavalerie, devint, à la fin du XIVe siècle, le général en chef de l’armée, et laissa au grand-écuyer le soin des équipages du roi. Les fonctions d’intendant de l’hôtel, dont le sénéchal avait été chargé, passèrent à celui qu’on appela le grand-maître de l’hôtel du roi, ou, par abréviation, le grand-maître de France. Le grand-bouteiller ou bouteiller de France fut au XIVe siècle président de la chambre des comptes. Il abandonna son ancien rôle domestique au premier échanson, qualifié, au commencement du XVIe siècle, de grand-échanson. De même le veneur, qui avait sous son intendance les eaux et forêts du domaine, devint le maître, puis le grand-maître des eaux et forêts du royaume, tandis que la direction des chasses royales passait à un maître de la vénerie, appelé plus tard grand-veneur, mais dont les attributions furent alors beaucoup plus restreintes que celle de l’ancien forestier du prince. Enfin le grand-chancelier, tout en gardant les sceaux, cessa d’être le secrétaire en chef et intime du roi pour demeurer exclusivement le véritable secrétaire d’état. Il souscrivit les diplômes solennels revêtus du monogramme royal. Plus tard, il