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sen van de Putte répondit que le gouvernement, loin de chercher à étendre ses possessions dans l’île de Sumatra, n’avait jamais eu d’autre intention que de vivre en bonne intelligence avec ce pays et avec les divers princes indépendans qui ont accepté la suzeraineté de la Hollande, mais qu’il ne pouvait permettre que la mauvaise foi de l’un d’entre eux abusât de cette longanimité pour pousser à la révolte des populations qui acceptent sans murmurer la domination néerlandaise.

Quelques jours après ces explications, l’on apprenait par un télégramme du gouverneur-général des Indes, en date du 1er avril, que la guerre avait été déclarée le 26 mars au sultan d’Atchin. Deux autres télégrammes expédiés le 17 avril donnaient de tristes nouvelles; le général Kohler avait été tué. L’ennemi opposait une résistance imprévue, et l’envoi de renforts devenait indispensable. Les télégrammes publiés au journal officiel produisirent dans toute la Hollande une impression profonde. Bientôt une dépêche du 20 avril annonçait que l’échec avait été complet, et que les troupes néerlandaises avaient dû battre en retraite et se rembarquer; la côte continuerait à être bloquée, et l’expédition serait renvoyée à l’automne prochain.

Le rapport déposé sur le bureau de la seconde chambre par le ministre des colonies énumère les motifs qui ont déterminé la guerre déclarée au royaume d’Atchin. Il mentionne parmi les causes générales les nombreux faits de piraterie, de pillage et de meurtre auxquels se livraient les habitans de ce pays, et, parmi les causes immédiates, la crainte d’une immixtion des puissances étrangères, crainte motivée par l’annonce du départ d’un envoyé atchinois pour l’Europe. Depuis plusieurs années déjà, les relations étaient rompues entre la Hollande et les sujets du roi d’Atchin, quand, après s’être comportés en voisins dangereux et hostiles, ils adressèrent en 1868 au sultan de Turquie une requête pour lui demander, comme à un suzerain religieux, son appui contre les Hollandais. Cependant le commerce et la navigation ne trouvaient aucune sécurité ni sur les côtes, ni dans les eaux d’Atchin. C’était là un danger d’autant plus grand pour la Hollande qu’elle s’était imposé, par son traité de 1824 avec l’Angleterre, le devoir d’assurer la tranquillité dans les parages du nord de Sumatra. Les visites de navires de guerre dans les eaux d’Atchin s’étaient succédé sans amener aucun résultat efficace. Les ministres du sultan d’Atchin se bornaient à de vagues promesses, dont ils cachaient l’inanité sous le cérémonial pompeux des peuples asiatiques. Les choses en étaient là lorsque le gouverneur-général des Indes orientales avait appris qu’une mission atchinoise s’était rendue à Singapour afin d’y faire des démarches auprès des consuls étrangers. Tout en insistant sur ce fait, le ministre des colonies reconnaissait dans son rapport que les déclarations les plus satisfaisantes avaient été faites au cabinet de La Haye par les puissances. Il était évident que la France, qui n’a aucun intérêt dans l’île de Sumatra