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qui a moins que jamais envie de se dissoudre ; vis-à-vis de tous ceux dont on veut retenir l’appui et avoir le vote, on reste un gouvernement d’indécision, de négociation permanente. Avant d’arriver à une résolution, on s’efforce de concilier toutes les fantaisies, on va ramasser les signatures, et sait-on quel est le plus dangereux inconvénient de cette politique ? C’est que la direction n’est nulle part et la confusion est partout, dans les travaux de l’assemblée comme dans l’action ministérielle. On s’épuise à créer ou à prolonger des accords factices dont le dernier mot est l’ajournement de tout ou un expédient qui ne décide rien. Que le ministère tienne à marcher d’intelligence avec la majorité, avec toutes les fractions de la majorité, rien de plus simple ; mais franchement, on ne peut pas dire le contraire, ce travail singulier finit quelquefois par ressembler à une comédie qui se complique, se débrouille, s’enchevêtre de nouveau, — pour arriver à quoi ? On n’a pas même un dénoûment. C’est en vérité depuis quelques jours l’histoire des laborieuses et assez bizarres négociations du gouvernement avec la commission de décentralisation au sujet de la loi municipale, qui semblait d’abord devoir être discutée avant les vacances, et qui a maintenant tout l’air d’être fort en péril. Le fait est qu’après toutes les conférences qui ont eu lieu, après tous les essais de transaction qui ont été mis en avant, on ne sait plus ce qui restera bientôt de cette malheureuse loi, à laquelle on travaille pourtant depuis deux ans et sur laquelle s’épuisent depuis trois semaines la droite, le centre droit, le gouvernement, la commission de décentralisation. Jusqu’ici on ne paraît pas même être parvenu à savoir si la loi sera présentée dans son ensemble ou partiellement, si elle sera discutée avant la prorogation prochaine de l’assemblée ou après les vacances. Le temps commence à presser cependant. D’ici à quelques mois, il faut renouveler les conseils municipaux ; avant tout, il faut refaire les listes électorales. On est donc entre la nécessité d’une solution et la difficulté de se mettre d’accord.

À quoi tiennent en réalité toutes ces contradictions confuses et stériles ? Il y a deux parties dans la loi, l’une réglant les conditions de l’électorat municipal, l’autre relative à la nomination des maires. L’électorat municipal, passe encore, on peut s’entendre, quoique qu’il y ait eu au premier moment des propositions d’une étrange nature sur lesquelles on est un peu revenu, il est vrai. La nomination des maires, c’est là le point délicat, c’est là qu’il y a une résolution à prendre et que la question se complique. Comment nommera-t on les maires ? Il y a deux ans, même en pleine guerre de la commune, on n’hésitait pas. Il y avait dans une grande partie de l’assemblée, surtout dans la droite, une passion très vive, presque naïve pour la décentralisation. Tout ce qui ressemblait à une extension des prérogatives, des influences locales, était fort en faveur. On ne voulait que des maires élus, sauf un certain