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à l’angle de la rue de la Pépinière, il est rejoint par un canal qu’on nomme le collecteur des coteaux, qui, venant du cours de Vincennes et parcourant la rue de Charenton, a repris presque exactement le tracé de l’ancien ruisseau de Ménilmontant, et accepte au passage les détritus des pays sillonnés par les boulevards de La Chapelle, Rochechouart et Clichy,

La rive gauche n’a qu’un seul collecteur; à sa source, il capte une rivière tout entière, la Bièvre, qui auparavant allait se jeter, au-dessus du pont d’Austerlitz, dans la Seine, qu’elle empoisonnait. Ce ruisseau fangeux, entre les rives amollies duquel coulait je ne sais quel liquide multicolore et nauséabond, a enfin reçu la seule destination qu’il méritait ; il est devenu un égout; la galerie qui le saisit rue Geoffroy-Saint-Hilaire, derrière le Jardin des Plantes, se dirige vers le boulevard Saint-Michel, y fait un coude et longe les quais jusqu’au pont de l’Aima; là, un double siphon métallique plongeant dans la Seine aspire tout le tribut du faubourg Saint-Marceau, du quartier latin, du faubourg Saint-Germain, le porte de l’autre côté de la rivière et le déverse dans une galerie qui, prenant route sous les hauteurs de Chaillot, évite l’Arc de Triomphe, qu’elle frôle, passe sous l’avenue Wagram, traverse le village de Levallois-Perret, tourne au nord, et se réunit au grand collecteur de la rive droite, 536 mètres avant l’embouchure en Seine. A la hauteur du pont de l’Aima, sur la rive gauche, il reçoit l’égout Montparnasse et recevra plus tard le collecteur de Grenelle, dont l’amorce est déjà construite; sur la rive droite, il sera augmenté par le collecteur d’Auteuil. Ce sont là les trois grandes artères souterraines de Paris, et on ne peut décrire l’énorme quantité d’embranchemens qui s’y rendent et s’y vident ; il faut regarder attentivement les vingt et une feuilles du Plan général des égouts de la ville de Paris pour comprendre l’importance, l’habile distribution de ce réseau sans fin, dont les ramifications s’étendent sous nos ruelles les plus infimes, et viennent au besoin jusqu’aux parties les plus mystérieuses de nos maisons.

Un tel travail ne s’est point accompli eu un jour; on n’en reste pas moins surpris en se rappelant que dix années environ ont suffi pour nous donner plus de 600 kilomètres d’égouts nouveaux ou