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A neuf heures du matin, le 13, l’attaque commençait. La brigade La Mariouse, qui se composait du 35e de ligne, des mobiles de l’Aube, de la Côte-d’Or, et qui, de la maison Millaud, son point de départ, avait plus de mille mètres à parcourir à découvert, sous. le feu de l’ennemi, avant d’atteindre les premières maisons de Bagneux, cette brigade s’avançait intrépidement sans se laisser émouvoir, sans répondre à la fusillade ; elle entrait à Bagneux de vive force, et s’y établissait victorieusement après en avoir chassé les Bavarois, qui laissaient 40 prisonniers dans ses mains. C’est là dans cette mêlée, près de l’église de Bagneux, que le commandant de Dampierre était frappé mortellement à la tête de ses mobiles de l’Aube. De son côté, la brigade Susbielle, vigoureusement conduite par son chef, avait attaqué Châtillon, et elle ne laissait pas d’éprouver des difficultés. Elle avait à enlever une série de murs crénelés qu’on lui disputait pied à pied, elle était obligée de marcher de maison en maison au milieu de la fusillade ; elle avançait malgré tout, sans dépasser le village qui s’étend sur la rampe, c’est-à-dire ce qu’on appelle le bas Châtillon. L’action après tout restait dans des conditions assez favorables pour que Vinoy pût écrire au gouverneur de Paris : « Nous sommes maîtres de Bagneux ; voulez-vous le conserver ? » Le général Trochu répondait en maintenant au combat engagé le caractère d’une « grande reconnaissance offensive, » et en laissant au général Vinoy comme au général Blanchard le soin de fixer l’instant où il faudrait se retirer. A trois heures de l’après-midi, on avait fait tout ce qu’on pouvait faire, les vigies signalaient de tous les côtés de fortes colonnes ennemies accourant au combat, et on se décidait à se retirer. On se repliait lentement, sans nul désordre. Un détachement de AOO marins, conduit de Montrouge par le capitaine de frégate d’André, sous la direction du contre-amiral Pothuau, couvrait la retraite du côté de Bagneux, et, faisant halte un instant, il arrêtait net par son aplomb, par la plus vive fusillade, les Bavarois, qui, revenus à notre suite, essayaient d’inquiéter notre mouvement.

N’aurait-on pas dû laisser l’action s’engager plus à fond ? n’aurait-on pas pu essayer de reprendre le plateau de Châtillon ? Assurément reprendre Châtillon le 13 octobre eût été tout aussi important que de le garder le 19 septembre, si on l’avait pu ; mais était-on en mesure de tenter ce coup audacieux, et si on avait un premier avantage, avait-on des forces suffisantes pour se maintenir ? Était-on préparé pour une grande bataille, au-devant de laquelle on allait inévitablement le lendemain ? Le combat du 13 octobre ne restait pas moins une affaire habilement conduite, vivement exécutée, et qui rentrait dans cet ordre d’opérations à demi défensives, à demi