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pieds de profondeur et quatorze canons montés sur ses remparts. Si imparfaitement fortifiée qu’elle pût être, Missolonghi n’en était pas moins à cette heure la clé de voûte de l’insurrection. Si elle succombait, les Turcs traversaient sur-le-champ le golfe de Patras et allaient donner la main aux troupes de Dramali-Pacha, établies depuis leur échec dans la plaine de Corinthe. Mavrocordato se jeta dans Missolonghi et déclara sa ferme résolution d’y périr.

Ce fut lui qui anima, qui soutint, qui dirigea la défense. Petro-Bey, Zaïmis, Delyannis, accoururent de la Morée à son appel. Le novembre, sept bricks hydriotes chassèrent les bâtimens que Yusuf-Pacha avait envoyés de Patras mettre le blocus devant Missolonghi, des munitions arrivèrent de Livourne, et la garnison se trouva portée par les renforts que lai amenèrent d’autres chefs moréotes au chiffre de 2,500 hommes. Harcelé sur ses derrières par les Grecs de l’Acarnanie et de l’Étolie, Omer-Vrioni résolut de brusquer l’attaque. L’assaut fut donné le 6 janvier 1823 au point du jour. Une volée de mousqueterie tirée à bout portant suffit pour repousser les volontaires albanais. Une seconde colonne, composée des Turcs de Méhémet-Reschid, laissa 200 morts sur le terrain. Six jours après cet échec, Omer-Vrioni se retirait par Vrachori et Karavasera sur Arta.

La campagne de 1823 menaçait la Grèce occidentale d’un danger plus sérieux. Tous les contingens de la haute et de la basse Albanie avaient été cette fois convoqués. Le gouverneur de Scutari, Mustaï-Pacha, réunit à Ochrida, sur les confins de la Macédoine, 5,000 Guègues musulmans et 3,000 catholiques mirdites. Le août 1823, la première division de cette petite armée, composée d’environ 4,000 hommes, atteignait la vallée de Karpenisi, et établissait son bivac au pied des montagnes où le Sperchius prend sa source. Pour se rendre de Karpenisi à Vrachori, il ne lui restait qu’une faible distance à franchir ; mais les sentiers les plus difficiles des Alpes peuvent seuls se comparer à cette route, tracée à travers une succession de passages effrayans et de rochers gigantesques. Marco Botzaris partit de Vrachori avec 400 Souliotes, et surprit à minuit le camp des Guègues. Les troupes ottomanes, brusquement assaillies au milieu de leur sommeil, prirent la fuite. Marco Botzaris se précipita vers la tente du bey. Cette tente avait été dressée dans un enclos et se trouvait gardée par les Mirdites. Les vaillans soldats qui comptent les compagnons de Scanderbeg parmi leurs ancêtres défendirent avec acharnement l’enceinte que les Souliotes tentaient d’escalader. Au moment où Marco Botzaris, s’appuyant sur son long fusil, s’apprêtait à franchir la muraille, une balle vint le frapper au front. Il tomba ; les Souliotes emportèrent son corps et laissèrent le champ de bataille aux Mirdites. Quelques