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à l’autorité catholique, on sait que toute immixtion des brebis dans le choix des pasteurs ou dans l’administration des propriétés de ceux-ci, vivans ou morts, serait à ses yeux la dernière des abominations.


IV. — LES CORPORATIONS RELIGIEUSES A ROME ET LES INSTITUTS ETRANGERS.

L’application à la province et à la ville de Rome des lois de 1866 et de 1867 était impérieusement réclamée par l’opinion publique, qui n’aurait pu s’habituer à l’idée que la capitale de l’Italie et sa banlieue fussent, par rapport au droit ecclésiastique du royaume, une exception à perpétuité, une sorte d’oasis à rebours. Le développement économique de la ville qui allait devenir la capitale d’un grand pays, l’assainissement de la campagne[1] qui l’entoure, exigeaient d’ailleurs qu’après la délivrance de la propriété laïque de tous les liens et de toutes les superpositions de droits compliqués qui l’embarrassaient, la propriété ecclésiastique immobilière fût aussi soustraite à la mainmorte et rendue libre et promptement négociable. Dans une province qui a en tout un revenu imposable de 95 millions de livres (terrains, 40 millions, — bâtimens, 28, — revenu mobilier, 27 millions), la propriété ecclésiastique en prend pour sa part 8 millions au moins[2].

Quant aux maisons religieuses, il est naturel que le nombre en soit à Rome et dans la banlieue beaucoup plus grand que partout ailleurs. On peut même dire qu’il est allé toujours en augmentant depuis trente ans, surtout sous le pontificat de Pie IX, qui a surexcité partout le sentiment religieux. La statistique évalue à 474 les couvens de la ville et de la province de Rome : 216 dans la ville, 73 dans les diocèses suburbicaires, 185 dans les autres communes

  1. L’Agro romano a une superficie totale de 203,000 hectares ; les fondations ecclésiastiques et laïques de la province de Rome en possèdent 71,000, qui se partagent ainsi :
    Basiliques majeures (Saint-Pierre, Saint-Jean de Latran, Sainte-Marie-Majeure 25,014
    Basiliques mineures 2,084
    Chapitres, bénéfices, évêchés 6,590
    Couvens 7,782
    Propagation de la foi, saint-office. 7,668
    Œuvres charitables, hôpitaux, confréries. 19,727
    Collèges étrangers. 2,495
    Total 71,360


    Les fondations laïques ne sont pas obligées de convertir leur propriété foncière.

  2. On ne peut savoir au juste comment ce revenu se partage entre la propriété foncière et la propriété mobilière. Il s’agit toujours du revenu estimé pour l’impôt foncier ou déclaré pour l’impôt sur la richesse mobilière. Voici comment il est partagé entre les différentes fondations et corporations.
    Ville de Rome. Rente nette.
    Couvens. 2,978,408 l.
    Basiliques et églises collégiales 1,143,969 l.
    Bénéfices ou chapellenies 297,686 l. 4,420,063 l.
    Diocèses suburbicaires et autres communes de la province.
    Couvens, 1,239,857 l.
    Menses épiscopales, séminaires 568,735 l.
    Bénéfices ou chapellenies 1,532,715 l. 3,341,307 l.
    Total pour la ville et la province 7,761,370 l.


    La rente de 2,978,408 l. a été dénoncée par 171 des 216 couvens de la ville de Rome. On ne connaît pas la rente de 30 autres couvens, et 15 ont déclaré ne rien posséder. Dans la ville de Rome ont dénoncé leur rente pour l’impôt de mainmorte 181 bénéfices seulement. Parmi les rentes dénoncées manquent celles des entités suivantes : la Propaganda Fide, le vicariat, la daterie, la chancellerie, la pénitencerie, la congrégation de la sainte visite apostolique, la congrégation de l’inquisition, les académies d’archéologie sacrée, de religion catholique, de liturgie, de théologie, les séminaires, les églises paroissiales à charge du clergé séculaire, les églises succursales, les églises simples, les oratoires, les confréries et archiconfréries. Par des informations privées, on sait que la Propaganda Fide a une rente de 406,650 l. sans compter les biens-fonds qu’elle possède dans les provinces de Bologne, Ferrare et Pérouse, et des sommes importantes en rente étrangère. La congrégation de l’inquisition (le saint-office) a dénoncé une rente de 73,931 l. qui ne figure pas dans les annexes a la loi. Sans craindre d’exagérer, on peut dire que la rente nette de toutes les fondations ecclésiastiques de la province de Rome n’est pas loin de 10 millions, toujours sans compter les maisons mêmes où ces diverses institutions ont leur résidence. «