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d’indiquer les principes qui ont dirigé sa conduite vis-à-vis de l’église catholique en Italie, de faire connaître les idées qui l’inspirent aujourd’hui dans les questions ecclésiastiques qui doivent être prochainement soumises au parlement italien.


I. — LES PRETENTIONS DE L’EGLISE ROMAINE.

Voilà bientôt trois ans que le jeune royaume d’Italie a fixé le siège de son gouvernement dans la capitale de la catholicité, que Victor-Emmanuel y vit à côté de Pie IX. Il est vrai que, si le roi habite Rome comme sa capitale, le pape s’est fait un devoir de ne pas sortir de l’enceinte du Vatican ; mais personne n’ignore et ceux qui l’entourent ne doutent pas que, s’il s’était montré, aucune marque de respect ne lui aurait manqué. Il faut bien le dire en effet, tout désagréable que cela puisse être aux radicaux et même aux libéraux d’une part et aux cléricaux de l’autre, — il y a deux opinions à Rome dans le sein d’une seule et même majorité, l’une qui préfère de beaucoup le gouvernement national et laïque au pouvoir temporel de l’église, l’autre qui, par des raisons très différentes, mais toutes très puissantes sur l’esprit des hommes en général et des Italiens en particulier, n’aime pas que la conscience religieuse du pays soit troublée, et qui verrait avec un vrai soulagement rentrer dans une vie calme et paisible cette église catholique à laquelle se rattachent de si séculaires habitudes.

Si vous vous promenez le long du Corso, vous trouvez à toute heure du jour une foule de personnes arrêtées devant des magasins d’estampes pour regarder avec complaisance une photographie qui représente le roi et le pape bras dessus, bras dessous ; on la voit partout, de plusieurs dimensions, en noir ou coloriée, et voilà sept ou huit mois qu’on ne cesse de l’exposer. Les deux grands adversaires y ont l’air d’être de vieux amis ; on dirait que le pape et le roi aiment à se montrer ainsi. Le pape bénit son compagnon et le présente au peuple ; le roi, très satisfait, semble penser : enfin nous y voilà je l’avais toujours dit. Malheureusement la politique pleine de bonhomie que paraît conseiller l’auteur de l’image populaire est difficile, peut-être impossible à réaliser. A la vérité, cette difficulté ou cette impossibilité n’a pas son origine dans les relations particulières qui existent à cette heure entre l’état et l’église en Italie, elle vient de la différence essentielle entre les principes qui guident partout aujourd’hui le pouvoir civil d’un côté et l’autorité