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l’Alsace et la Lorraine quand on les rend à leur mère-patrie ? lui Du reste, poursuit la gazette, ces considérations importent peu ; l’Italie a besoin de l’Allemagne, et elle en aura besoin tant qu’elle ne sera pas plus forte. « Il peut se rencontrer des Italiens qui, par sentimentalité pure, pour avoir étudié l’histoire dans les livres français, déplorent le sort de l’Alsace ; mais il n’est pas un Italien qui ne se dise au fond : Mieux vaut les Allemands en Alsace que les français en Italie. » Tel est le dernier mot des polémiques allemandes au sujet de l’Italie : l’Italie ne doit rien à la France, ses intérêts l’éloignent de l’alliance française et lui commandent de s’unir à l’Allemagne. C’est grâce aux victoires de la Prusse que Victor-Emmanuel a pu aller à Rome, il ne peut s’y maintenir qu’avec l’alliance prussienne. « Au-delà des Alpes, disait dernièrement un article reproduit par la Correspondance de Berlin, on ne devrait pas se faire plus d’illusions qu’en Allemagne sur les sentimens du président de la république. Chaud patriote français, M. Thiers est anti-allemand, anti-italien et clérical. Heureusement il réfléchit, et c’est une garantie pour la paix ; malheureusement il est vieux. La France est catholique et ultramontaine ; sa politique implique le rétablissement du pape. L’Italie est italienne et libérale : sa politique exige que le pape reste dans sa position actuelle. Une alliance est donc impossible entre la France et l’Italie. »

La France est vouée à la politique ultramontaine, et cette politique lui sera fatale ; le parti conservateur français est un parti clérical, et comme tel sans avenir, ce sont là deux idées sur lesquelles les feuilles allemandes reviennent constamment quand elles parlent de nos affaires intérieures. L’empire allemand est engagé dans une guerre à mort contre l’église romaine ; la presse le soutient avec énergie, surtout dans les escarmouches où cette guerre l’entraîne avec les états étrangers. Certains journaux français, dans des intentions très patriotiques assurément, ont l’imprudence de témoigner à l’opposition catholique en Allemagne une sympathie fort intempestive et nullement payée de retour. Il n’en faut pas davantage pour que les publicistes prussiens transforment les catholiques au sud en alliés de la France ; c’est un moyen de déconsidérer du même coup l’ennemi du dehors et l’adversaire du dedans. Il n’y a pas de jour où les gazettes nationales-libérales ne déclament contre les jésuites. Elles ne voient, en France, dans la droite conservatrice qu’une vaste « congrégation, » une conspiration permanente contre le progrès moderne représenté par l’empire allemand. Elles se montrent assez peu effrayées d’une monarchie orléaniste : elles n’y croient pas. Elles sont un peu plus préoccupées d’un retour à l’empire ; « ce despotisme bigot, dit une gazette, n’est pas en dehors des