Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 104.djvu/68

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

protégée contre la concurrence étrangère par un droit d’entrée cinq fois plus élevé que la taxe intérieure, et à la faveur de ce régime, voisin de la prohibition même, l’industrie nationale prit un vigoureux essor, notamment en Prusse, dans les provinces de Saxe, de Silésie et de Brandebourg. En 1858, le gouvernement de Berlin réussit enfin, — non sans peine, — à entraîner les autres membres du Zollverein dans une voie plus libérale, en faisant valoir que la production sucrière avait atteint son apogée, que d’ailleurs le sucre étranger entrait pour moins d’un quart dans la consommation totale. Le droit de douane venait d’être réduit, et, pour affirmer davantage encore l’abandon des idées protectionistes, on augmenta l’impôt sur la fabrication. En même temps, la Prusse remit sur le tapis la question des restitutions à la sortie qu’elle soulevait inutilement depuis 1854, et elle obtint pour les fabricans exportateurs une prime de 20 francs par quintal de sucre brut, c’est-à-dire l’équivalent de la taxe intérieure. La loi du 16 janvier 1869, votée par ce parlement douanier auquel incombait la mission de vider les anciennes querelles des membres du Zollverein, augmenta encore la prime de sortie, afin de permettre à l’industrie de soutenir la concurrence au dehors, et elle atteint si bien ce but que l’exportation s’approprie tous les jours de nouveaux débouchés. Une pareille situation est de nature à préoccuper vivement nos législateurs, car l’Allemagne, dont la fabrication arrivait à peine jusqu’ici à 200 millions de kilogrammes de sucre brut, en produira cette année 260 millions, et il devient urgent de donner aux industriels français, par un meilleur règlement de l’impôt, les moyens de repousser cette nouvelle invasion.

Le produit des droits sur l’alcool (Branntweinsteuer) et sur la bière (Brausteuer) ne se rattache que partiellement au budget impérial, la Bavière, le Wurtemberg et le duché de Bade conservant la faculté de régler ces droits à leur guise, sauf à ne prendre aucune part dans les recettes opérées au même titre par les états de l’ancienne confédération de l’Allemagne du nord. Le sud avait d’impérieux motifs pour stipuler cette réserve, car le Brausteuer, en Prusse et dans les territoires voisins, représente à peine 40 centimes par tête en 1870, tandis qu’il s’élève par exemple à 5.40 en Bavière, où la consommation est beaucoup plus importante. Cependant la constitution de l’empire émet « le vœu » que les confédérés s’entendent le plus tôt possible au sujet d’une loi uniforme, et les écrivains officieux insistent pour que l’on supprime résolument tout ce qui fait obstacle à l’unité administrative du nouveau gouvernement. Les états du sud pourraient, il est vrai, adopter les taxes du nord en stipulant à leur profit un préciput sur la masse