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abaisser, de même que, cent ans plus tard, les plaines du far-west furent un obstacle qu’il fallut franchir à tout prix. Créer de l’est à l’ouest des voies de communication économiques et rapides était la condition essentielle de toute prospérité. Nous allons montrer comment on y est parvenu. On n’omettra pas de remarquer que New-York était sous ce rapport la ville la plus favorisée, grâce à l’Hudson ; il n’est pas étonnant que cette cité soit devenue la capitale commerciale des États-Unis.


II

Les états affranchis en 1776 de la domination anglaise ne s’occupèrent d’abord que de routes de terre. Les ressources que l’on y pouvait consacrer étaient bien restreintes en comparaison des vastes espaces qu’il s’agissait de desservir : aussi n’obtint-on que des résultats insignifians. La difficulté des transports semblait être un obstacle absolu pour le commerce d’exportation. De Buffalo, sur le lac Erié, à Albany, sur l’Hudson, il y a 500 kilomètres : le transport d’une tonne de marchandise coûtait alors 500 francs entre ces deux villes ; c’est aujourd’hui le prix d’une tonné de bœuf ou de porc à New-York et le double de ce qu’y coûte le froment. Au commencement du siècle, l’état de New-York entreprit d’ouvrir un canal dans cette direction. Les travaux durèrent neuf ans ; ils furent achevés en 1825. L’influence s’en fit promptement sentir, car le prix du fret s’abaissa tout de suite à 50 francs.

Les ingénieurs américains, bien novices en toutes choses, n’avaient surtout aucune expérience des ouvrages hydrauliques ; il est donc assez naturel que ces travaux fussent imparfaits. Cependant la création d’une voie d’eau artificielle de si grande longueur était déjà une merveille. On ne s’en tint pas là. Sur ce canal principal s’embranchèrent de nombreux canaux secondaires qui se dirigeaient vers le lac Champlain, la Susquehannah, le lac Ontario ; puis l’expérience apprit que le tirant d’eau se trouvait trop faible et que les écluses étaient trop étroites. On entreprit alors, entre 1835 et 1862, de refaire ces canaux sur de plus grandes dimensions, et en présence de l’accroissement continuel du tonnage malgré la concurrence des chemins de fer, on se demande déjà s’il ne deviendra pas nécessaire de remanier encore une fois tous les travaux.

Ce qu’il y a de particulier, si l’on compare ces voies navigables à celles de l’Europe, c’est qu’elles n’ont pas été, sous le rapport financier, une mauvaise affaire pour l’état de New-York, qui entreprit de les exécuter à lui seul avec les ressources de son budget. La dépense première, qui s’est élevée à 323 millions, est aujourd’hui