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laissé tant de réparations à faire et de questions litigieuses à vider.

On le voit, la besogne ne manque pas au conseil municipal pour liquider tous ces engagemens et mettre un peu d’ordre dans cet arriéré. Bercy, les écoles, la dérivation de la Vanne, voilà bien la matière d’occupations immédiates, comme aussi la recherche des modes de libération les plus prompts et les mieux appropriés. La ville de Paris a eu dans ces derniers temps la bonne fortune d’avoir successivement à sa tête deux administrateurs qui ont vécu dans l’étude des maîtres, et pour qui la science des finances a peu de secrets. Déjà M. Léon Say a proposé pour les grandes et petites dettes une conversion et des amortissemens qui, à des combinaisons ingénieuses, unissent la solidité des calculs et semblent résoudre le difficile problème de soulager le présent en ne chargeant pas trop l’avenir. M. Calmon ne manquera pas de son côté d’émettre ses vues et d’exposer ses plans ; le conseil municipal aura à choisir entre ces propositions et probablement à les combiner ; mais de telles opérations sont des plus délicates, elles exigent une grande circonspection. Il n’y faut songer qu’à de certaines heures, suivant les circonstances, l’état du crédit, la marche générale des affaires. Ce qui est d’une application plus constante, c’est la modération dans la dépense, une vigilance de tous les instans, un contrôle sérieux dans les services ; c’est également le soin de regarder de près aux nouveautés et de se défendre contre les surprises. Les plus grands embarras de la ville proviennent d’affaires mal engagées, dont quelques mains intéressées ont presque toujours tenu les fils. Un autre écueil, c’est l’engouement qui parfois naît de courans d’opinions auxquels cèdent les meilleurs esprits, les cœurs les plus sincères.

On a pu le voir au sujet de la stagnation qui depuis la guerre sévit dans les travaux du bâtiment : pour les ouvriers longue interruption de travail qui a dévoré bien des épargnes, pour les entrepreneurs liquidations écrasantes, pertes sur pertes dans ce jeu de la construction, qui autrefois leur valait de si belles aubaines, dans quelques cas impuissance de satisfaire à des engagemens pris ; — voilà une cruelle revanche du sort et un revers de médaille bien triste. Ce sont là, il est vrai, des châtimens individuels, mais ce châtiment frappe tant de victimes que c’est presque l’équivalent d’un dommage public. Le conseil municipal s’en est ému, et il est naturel qu’il ait répété les mots qui reviennent à toutes les crises du même genre, « quand le bâtiment va, tout va. » Que tout aille lorsque la spéculation privée est seule en cause, aux risques et périls de qui de droit, soit ; mais si les caisses municipales sont mises à contribution directement ou indirectement, c’est autre chose ; il faut alors ouvrir un compte, au bâtiment, voir ce qu’il coûte et ce qu’il rapporte. Nos charges présentes prouvent comment ce compte