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personnelles règnent le même égoïsme et la même ténacité ; en multipliant les exemples, on trouverait également que, pour les mœurs et les habitudes, nous sommes restés ce que nous étions à peu près. Somme toute et quoi qu’on en dise, nous n’avons pas jusqu’ici gagné grand’chose à l’école de l’adversité.


III

Nous avons insisté jusqu’à présent sur ce qui forme le pivot pour ainsi dire des finances de la ville de Paris, le remboursement au moins partiel des 200 millions qu’elle a dû emprunter à la Banque de France. Il nous reste à jeter un coup d’œil sur le budget de 1873, qui donne en détail l’état des recettes et des dépenses, et, mis en regard de celui de 1869, permet de comparer les deux situations avant et après la guerre. Il y a des services dont les allocations ont augmenté, et dont les augmentations se justifient d’elles-mêmes, d’autres qui n’ont pas sensiblement varié, d’autres enfin qui ont été réduits et presque supprimés ; on peut prévoir lesquels.

L’une des premières tâches de M. Léon Say, quand il eut, après un long dépouillement, bien fixé la dette, fut de rechercher s’il ne serait pas possible de l’alléger par une de ces combinaisons où il pouvait s’inspirer d’études qui lui sont familières. Il venait de faire le compte des deux dettes, la dette fondée et la dette flottante, donnant un total de 1 milliard 630 millions en capital pour cinq emprunts principaux, et d’autres emprunts ou engagemens à diverses échéances, et de 88,200,000 francs de charge annuelle. Beaucoup d’états n’ont pas de plus gros chiffres ; 88 millions en nombre rond à prélever, pendant de longues années, sur les revenus municipaux, 88 millions de dépenses obligatoires, au premier chef irréductibles, de dépenses sur lesquelles l’administration n’a point d’action, tel était le legs du passé, lourde charge dont l’aisance publique, le progrès des richesses, le développement du travail peuvent seuls diminuer le poids. Dès lors pourtant M. Say entrevit dans l’avenir un allégement-possible au moyen de quelque opération de conversion de ces dettes, les unes sont à échéances longues, et les autres à échéances plus courtes, et l’amortissement pourrait, en étant réparti plus également sur les années lointaines, devenir moins onéreux dans le présent. Une annuité de 88,200,000 francs mise en regard d’un capital de 1 milliard 630 millions représente 5 fr. 41 c. pour 100, ou 5 fr. 30 cent, d’intérêt, et 11 centimes d’amortissement, si l’amortissement s’opérait en soixante-quinze ans. Or il n’est point impossible de prévoir, dans un avenir plus ou moins éloigné, que le taux de l’intérêt pourrait être abaissé à 5 ou même