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cour de cassation, consacrée par trois arrêts des 6 avril 1836,15 mai 1841 et 18 décembre 1843, mettent Paris à l’abri de toute réclamation de ce genre qui ne proviendrait de son propre consentement. Les arrêts surtout sont des plus explicites ; il y est dit « que Paris est le siège du gouvernement, que c’est le gouvernement lui-même et non un magistrat municipal qui veille à Paris à la conservation de l’ordre public, et qui dispose seul de tous les moyens de surveillance, de protection et de répression. » L’immunité est donc incontestable pour la ville ; en serait-il de même pour l’état ? Il est vrai que la controverse existe sur ce point, et que nos gouvernemens successifs n’ont jamais voulu reconnaître en principe que l’état dût être responsable des dégâts que l’insurrection pouvait commettre dans Paris ; mais en fait il a accordé à diverses reprises des indemnités à propos des événemens de février et de juin 1848, plus tard de 1851, en donnant à l’appui des motifs qui coïncident avec les arrêts de la cour de cassation. Dans tous les cas, le désistement du conseil municipal n’en est pas moins avantageux par les éventualités qu’il supprime et les voies qu’il ouvre à un accord. La charge est lourde, et, si l’accord aboutit, la ville liquidera toutes ces indemnités à ses frais et risques. Pour un autre objet et avec un concours relatif, la ville est encore venue en aide à l’état : elle figure pour une part très large dans les aggravations d’impôt que l’assemblée nationale a successivement autorisées au profit du trésor public. Ainsi du chef seul de Paris l’impôt sur les patentes supporte une augmentation de 14,445,388 francs, sur les alcools de 9 millions, sur les vins en cercle de 2 millions, sur les vins en bouteilles de 200,000 fr., enfin l’impôt nouveau sur les billards fournit un contingent de 335,580 fr. C’est en totalité 25,984,638 fr. versés en plus dans les caisses de la trésorerie ; pour les patentes, c’est près du tiers de la contribution générale de la France (45,532,609 fr.)

Telles sont les conditions dans lesquelles le projet de loi relatif à la contribution de guerre s’est présenté à la commission chargée de l’examiner.


II

Ici est survenu un incident qu’il était facile de prévoir. Concurremment avec la réclamation de Paris, les départemens avaient envoyé d’autres réclamations plus formidables encore. Ce n’était plus une somme facilement appréciable comme celle que Paris a versée entre les mains des Allemands après l’avoir empruntée à la Banque de France ; c’étaient, en grande partie du moins et à côté de quelques amendes et contributions en argent, des réquisitions en nature, des dépenses de logement et nourriture de troupes, des dommages