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Rien n’y indiquait un acte spontané et direct, un engagement municipal ; c’était une convention conclue le 28 janvier 1871 entre le gouvernement de la défense nationale et le gouvernement allemand, où la somme exigible servait de gage et de prélude à l’armistice général qui devait s’étendre à la France entière. En vain aurait-on objecté que la ville de Paris avait exécuté la convention, et qu’en l’exécutant elle avait ratifié l’engagement pris en son nom. Ce n’est pas la ville de Paris, c’est le gouvernement de la défense nationale qui, empruntant le nom de la ville de Paris, a exécuté l’article 11 de la convention, et il suffit, pour s’en convaincre, de rappeler quelle était à cette époque l’administration de la ville de Paris.

La commission qui, sous l’empire, faisait fonction de conseil municipal avait été dissoute par la force des choses quand tomba le régime impérial ; trois jours après le 4 septembre 1870, M. Etienne Arago était nommé maire de Paris, et administrait sans conseil jusqu’au mois de novembre, où le gouvernement de la défense nationale, par un scrupule tardif, s’avisa qu’une mairie centrale ne pouvait relever que d’un titulaire pris dans ses rangs, tant que dureraient les conditions exceptionnelles du siège. A raison de ce motif et à ce titre, il nomma alors M. Jules Ferry, membre du gouvernement, administrateur délégué de la ville de Paris. N’était-ce pas témoigner ouvertement qu’entre le gouvernement et la ville la partie était étroitement liée, et que leurs intérêts se confondaient ? La ville n’avait ni une représentation particulière ni un agent distinct ; le gouvernement stipulait seul pour elle, et au su de tout le monde disposait de ses fonds et occupait ses locaux.

Le droit était donc fondé ; le besoin ne l’était pas moins, et il y avait lieu d’en fixer l’étendue comme base d’une transaction éventuelle. C’est ce que fit le nouveau préfet de la Seine, M. Léon Say, dès son entrée en fonctions. Avec une grande promptitude de coup d’œil, il porta la lumière dans une comptabilité qui semblait anéantie par une suite de dévastations, et parvint à en reconstituer les élémens. Son premier acte fut d’assurer par un emprunt le remboursement à la Banque de France et la marche régulière des services municipaux, puis, récapitulation faite des diverses annuités de la dette consolidée et des dettes flottantes, de s’en servir comme de chiffres à l’appui des répétitions de la ville vis-à-vis de l’état. Ce passif chargé des fautes du passé en résume éloquemment par les sommes la gravité et par les dates les auteurs. Il consiste en cinq emprunts qui sont à des échéances différentes : le plus ancien est de 1855, le suivant de 1860, tous deux seront amortis en 1897, celui de 1885 en 1929, celui de 1869 en 1909 et celui de 1871 en