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dont ils s’enduisent le corps, rendant ce muscle inutile, il s’est tellement aminci qu’il ne peut plus imprimer à la peau le moindre mouvement. Il en est de même des muscles qui meuvent l’oreille du cheval et d’autres animaux ; nous les possédons tous, mais ils ne nous servent à rien. Placée sur les côtes et non pas au sommet de la tête, notre oreille ne saurait diriger l’ouverture de son pavillon vers tous les points de l’horizon pour recueillir les sons qui en partent. Voici d’autres exemples : les mamelles existent chez l’homme comme chez la femme ; on observe même du gonflement et de la sécrétion lactée chez quelques jeunes gens à l’âge de la puberté ; mais les fonctions de l’allaitement ont développé les seins de la femme, tandis que ceux de l’homme se sont atrophiés. On remarque à l’angle interne de l’œil une petite production de couleur rouge sans usage, c’est la trace de la troisième paupière des oiseaux de proie, qui leur permet de fixer le soleil sans fermer les yeux. — Les animaux marsupiaux, tels que les sarigues et les kangourous, sont munis d’une poche où les petits habitent pendant la période de la lactation ; cette poche est soutenue par deux os en forme de V et fermée par deux muscles. Quoiqu’il soit placé à l’extrémité supérieure de l’échelle des mammifères, dont les marsupiaux occupent les gradins inférieurs, l’homme a conservé les traces de cette disposition ; ses épines du pubis représentent les os, ses muscles pyramidaux sont les analogues des muscles qui ferment la poche marsupiale ; chez nous, ils sont évidemment sans usage. Il y a plus, ces organes rudimentaires peuvent être non-seulement inutiles, mais encore nuisibles. Le mollet est formé par deux muscles puissans qui s’insèrent au talon par l’intermédiaire du tendon d’Achille ; à côté d’eux se trouve un autre muscle long, mince, incapable d’une action énergique, le plantaire grêle. Ce muscle, ayant les mêmes attaches que les jumeaux, semble un mince fil de coton accolé à un gros câble de navire. Chez l’homme, il est sans utilité, et la rupture de ce muscle, causée par un effort pour sauter, donne lieu à l’accident douloureux connu sous le nom de coup de fouet, et dont la guérison nécessite un repos prolongé. Chez le chat et les animaux du même genre, le tigre, la panthère, le léopard, ce muscle est aussi fort que les deux jumeaux, et rend ces animaux capables d’exécuter des bonds prodigieux quand ils s’élancent sur leur proie. Autre exemple : dans les herbivores, le cheval, le bœuf et certains rongeurs, le gros intestin présente un grand appendice en forme de cul-de-sac, appelé cœcum, qui se rattache au régime exclusivement herbivore de ces animaux ; chez l’homme, dont la nourriture n’est pas exclusivement végétale, le cœcum se réduit à un petit corps cylindrique dont la cavité admet à peine une soie de